Au boulot !

Aujourd'hui, j'ai passé la journée à Royaumont pour un atelier/réunion/déjeuner boulot.... Je ne sais pas si vous connaissez l'Abbaye de Royaumont, dans le Val d'Oise, à 40 kilomètres au nord de Paris, mais c'est un lieu enchanteur. Une ancienne abbaye cistercienne, magnifiquement restaurée, qui accueille aujourd'hui des activités artistiques et culturelles liées à la musique et à la danse principalement, et où l'on peut organiser des séminaires, des déjeuners dans un cadre sublime, ce que nous faisions aujourd'hui. Soit dit en passant, j'ai mangé du confit de canard et du gâteau chocolat/praliné, alors que je suis en plein régime, et c'est pas bien du tout !!!! Mais bon, je sens bien que je ne vais pas faire pleurer sur mon sort, alors que j'ai mangé là :

Royaumont

C'est un peu compliqué d'expliquer ce que je fais, mais disons que mon boulot est lié à la production audiovisuelle, et principalement à la coproduction internationale. Ce qui fait que je suis amenée à rencontrer des gens de tous pays, dans le cadre de réunions comme celle-ci, consacrée aujourd'hui à des producteurs de toute l'Europe, anglais, italiens, belges, espagnols, tchèques... Il y a deux semaines, j'ai passé quelques jours avec des québécois. Et à la fin de la semaine nous accueillons des coréens.

J'avoue que depuis bientôt deux ans que je bosse dans cette boite, j'ai chaque jour un peu plus l'impression d'avoir tiré le gros lot professionnel, tellement c'est passionnant de rencontrer tous ces gens, de les aider à mener à bien de beaux projets, d'en initier certains, même...

Mais bon, je me dis aussi que je ne l'ai pas volé, et que ce bien-être professionnel récent est un véritable soulagement après pas mal de galères dans ce domaine. J'ai même bossé dans la télé-réalité, moi ! Pour vous dire que ma vie n'a pas toujours été rose au boulot, j'vous jure....

En fait, quand j'ai débarqué à Paris pour faire des études de cinéma, je voulais être ré-a-li-sa-tri-ce ! Rien d'autre. Ecrire et réaliser mes films. Voilà, c'est tout. Je bassinais mes parents - qui ont toujours respecté ce choix - avec ça depuis l'âge de 12 ans, qui est l'âge auquel j'ai du découvrir "La nuit américaine" de Truffaut, révélateur de ma "vocation". D'ailleurs à la fac, nous étions quasiment tous là à cause de ce film-là. Et le jour où Truffaut est mort, je n'étais pas la seule à pleurer.

Et puis, et puis.... la vie et l'expérience se chargent de vous emmener ailleurs que là où vous vouliez aller. Pour ma part, la bifurcation de la réalisation à la production s'est faite au départ à cause d'une grosse déception : quand j'ai commencé - toute excitée - à fréquenter mes premiers plateaux de tournage, j'ai immédiatement senti que là n'était pas ma place. En fait, je l'avoue, je DÉTESTE les plateaux. Je m'y ennuie à périr, je trouve tout ce cirque long et fastidieux, là où d'autres adorent l'ambiance, ce que je peux concevoir, mais bon, pas moi ! Alors y passer des semaines pour réaliser un film... En plus il faut mener toute une équipe, moi qui n'ai pas une once d'autorité !

Dernier problème qui a définitivement mis fin à ma vocation première.... j'ai un souci... allez j'ose le dire.... avec les acteurs. Euh, pas tous attention ! (JF si tu lis ces lignes, un jour, je t'adore et je suis positivement ravie de partir en Inde avec toi, alors tu vois !). Mais bon, moi qui suis pragmatique et rationnelle, organisée, méthodique et précise (enfin, la plupart du temps).... j'ai parfois eu l'impression de me trouver face à des ovni tellement certains sont des êtres fantasques et évanescents, improbables et égocentriques, nécessitant plus d'attention que la fleur la plus délicate, et alors quand ils sont célèbres, souvent c'est le pompon !.... Hors de question de généraliser, j'en connais d'adorables et passionnants, humains, fragiles et attachants, et certains sont des amis très chers (JF, je t'aime fort !), mais y'en a... faut s'les fader ! Et je me voyais mal diriger certains de ces êtres à mille lieux de moi, dont certains que j'ai parfois eu envie de jeter par la fenêtre la plus proche, je l'avoue (JF, cesse de bouder, ça ne te concerne pas, j'te dis !).

Donc j'ai cherché où exercer mes talents tout en restant dans la profession, et la production s'est imposée comme la fonction la plus naturelle pour moi : c'est l'endroit où l'on suit le film de la genèse (le scénario, donc l'écriture, donc ce que j'aime en tout premier lieu) à la finalisation et la sortie. Et mes capacités d'organisation ont trouvé là à s'employer au mieux. De plus, je manie les chiffres avec pas mal de bonheur, ce que je n'aurais pas cru à mes débuts, et mijoter un plan de financement ou gérer un budget sont tout à fait dans mes cordes.

Attention, je n'ai pas bossé que dans le cinéma (rayon "noble" de la production audiovisuelle), j'ai fait du film d'entreprise (les chaines d'assemblage de bagnoles, les conférences bancaires, le film médical qui me faisait tourner de l'oeil...), j'ai bossé sur des émissions télé à chier, des téléfilms pour ménagère de moins de 50 ans, croisé des producteurs véreux et d'autres mythomanes, galéré aux Assédic comme intermittente du spectacle, tout ça quoi. Alors aujourd'hui, mon boulot intéressant, plein de rencontres et même de voyages, et ben je l'ai mérité je dis, moi !

Ce que je garde de "création", c'est l'écriture, même si écrire un scénario n'est pas un plaisir "littéraire". Mais c'est toujours raconter une histoire, et c'est l'essentiel. Peut-être qu'un jour, plus tard quand je serai grande, un des miens verra le jour sur un écran, mis en scène par quelqu'un d'autre que moi.... et ce sera très bien comme ça.

Commentaires

1. Le lundi 12 décembre 2005, 23:21 par coumarine

Super passionnant ce que tu racontes là...ce serait bien que tu en dises davantage...mais bon je ne te visite pas depuis longtemps, peut-être que tu as déjà expliqué tout ça...

2. Le lundi 12 décembre 2005, 23:36 par Ursun

Je ne crois pas, Coumarine, ou alors il me faudrait changer mes yeux. Notre Traou est un petit animal discret et sauvage, elle livrera ses secrets quand elle l'aura décidé :o)
Mais elle a une sacrée plume, hein ? On traverse avec elle toutes ses galères professionnelles comme si on y était...

3. Le mardi 13 décembre 2005, 09:51 par Anitta

De la façon dont tu le racontes, je veux bien y croire, moi, à ce gros lot professionnel...! Même si comme Coumarine et Ursun j'ai envie d'en savoir un peu plus (curiosité quand tu nous tiens). Juste une question, tiens, pour commencer : comment s'effectue le choix des scénarios ? Il y a un comité de lecture, comme dans les maisons d'édition ? Tu y participes ? Bon, réponds à ton rythme, hein. Je ne me formaliserai pas du tout de devoir attendre ton retour d'Inde pour en découvrir davantage :)

4. Le mardi 13 décembre 2005, 10:36 par Anne

Profite de ce gros lot, alors ! Et dis nous, si un jour un des tiens, réalisé par quelqu'un d'autre...

(Es-tu montée dans la tour, à Royaumont ? Mes poumons, genoux et cuisses en gardent un souvenir... hum hum... merveilleux !)

5. Le mardi 13 décembre 2005, 10:58 par tita67

Je partage ton avis aigre-doux à propos des acteurs ! Pour en avoir fréquenté beaucoup à l'époque où je vivais avec scénariste fou, je confirme : leur égocentrisme est fascinant. Quant aux tournages je trouve qu'il n'y a rien de plus ennuyeux et épuisant... Alors vive la prod.

6. Le mardi 13 décembre 2005, 13:52 par serge

Je suis moi-même scénariste-réalisateur-acteur. J’ai commencé il y a longtemps et j’ai été tour à tour J.Wayne, Lancelot, le plus grand footballeur du monde, puis papa dans une grande saga pas encore primée. Chaque fois c’est la Production qui a freiné : pas assez d’argent, pas assez ou trop d’engagement, scénario pas assez ou trop original… C’est un combat éternel…Qui dure !
Ah oui, au fait, cette grande fresque…C’est ma vie ;) je me demande si je ne vais pas finir avec un plateau télé... Assis dans un canapé :)

7. Le mercredi 14 décembre 2005, 00:42 par Traou

Coumarine > Que j'en dise davantage ? Sur mon boulot ? A voir, mais en changeant les noms alors, car je risquerais moult procès !!! Mais j'y réfléchis pour la rentrée, c'est vrai qu'il y aurait quelques trucs drôles à raconter. Et quelques belles rencontres aussi.

Ursun > Pas de secrets pour le plus gentil des Ours...

Anitta > La curiosité est un très joli défaut. Pour les scénarios, je n'ai pas vraiment droit de regard. Disons qu'en gros les producteurs viennent nous voir pour trouver un partenaire financier, en France ou à l'étranger, que nous les aidons à trouver. Mais il n'y a pas de "choix" de notre part. J'ai juste quelques projets "chouchous" auxquels je vais peut-être être plus attentive (mais chut, il ne faut pas le dire...)

Anne > Bien sûr, si un jour un scénario (très précisément celui que j'ai commencé à faire lire depuis quelques temps..) voyait le jour, je crierais ma joie ici ! La tour, non, je n'ai fait que me balader et manger, à Royaumont, grimper, trop dur ;-)

Tita > Je suis contente de voir que je ne suis pas la seule à m'ennuyer sur un tournage !

Serge > Tu piques ma curiosité : mais qui est ce Lancelot / John Wayne ?.....

8. Le mercredi 14 décembre 2005, 01:06 par Anitta

Bon, promis : si je tourne un jour un film, je serai la plus docile des actrices. Vous mettrez ma caravane plein nord et je me plaindrai pas, vous changerez mon texte au dernier moment et je l'apprendrai encore plus vite par coeur, vous me ferez manger des moules-frites trois fois par semaine, et je baiserai vos pieds !

9. Le mercredi 14 décembre 2005, 01:29 par Traou

Anitta > Espères-tu faire croire à qui que ce soit que tu es actrice, de cette façon-là ?.... (mais tu serais un rêve pour le moindre régisseur, tsst, tsst....) :-) S'ils étaient tous comme toi, je crois que j'aimerais les acteurs !

10. Le mercredi 14 décembre 2005, 07:50 par obni

C'est en voûtant le regard qu'on apprécie la cuisine… J'aime beaucoup ces restaurants qui ont une âme.

11. Le mercredi 14 décembre 2005, 20:03 par Vroumette

Etant d'une discrétion à toute épreuve et d'une rare diplomatie, j'ai une petite requête : et si tu publiais une fois de temps en temps le scénario du film que tu aimerais tourner. J'avoue que j'apprécierai de le lire (bon, c'est chtite demande, hein, je comprendrai que tu n'en n'aies pas envie). Ah j'allais oublier : pitié prends Anitta dans ton film, j'adorerai la voir crever l'écran.

12. Le mercredi 14 décembre 2005, 20:39 par Traou

Obni > Attention, Royaumont n'est pas à proprement parler un restaurant, même si on peut y organiser des repas dans le cadre de séminaires. Si tu t'y présentais comme ça, tu risquerais de rester sur ta faim....

Vroumette > J'adore tes "chtites demandes" énoncées avec tellement de gentillesse et de drôlerie ! La chtite demande en question représente quelques 140 pages, donc ça risquerait d'encombrer un peu mon blog.... (c'est beaucoup trop long d'ailleurs, je suis en train de couper dedans. Un scénario c'est en gros 1 page = 1 minute). Mais promis, je vous raconterais parfois des anecdotes qui sont dedans (c'est une comédie). J'aimerais bien avoir vos avis éclairés.

13. Le mercredi 14 décembre 2005, 22:07 par Vroumette

Allez on va la faire à la façon jeuns : trop coolll ! Je vais tenter dans les prochains commentaires de laisser des messages subliminaux pour t'inciter à nous mettre le scenario dans son intégralité (bien sur ce seront des messages d'une rare finesse, tu t'en doutes !).

14. Le mardi 20 décembre 2005, 00:18 par La Jeune Divorcée

Traou, j'aime de plus en plus ton blog, c'est toujours un plaisir de te lire.
Mais puis je me permettre, en bonne provinciale Picarde que je suis de te corriger, l'abaye de Rouyaumont se trouce en Picardi, dans l'Oise.
Mais je suis d'accord avec toi, c'est un site magnifique

15. Le mardi 20 décembre 2005, 19:46 par Traou

Jeune Divorcée > Hello, je suis toujours contente de t'accueillir ici !
Nous pouvons le jouer au poker si tu veux (ou au bras de fer, ou devant un bon verre, plutôt), mais l'Abbaye de Royaumont se trouve officiellement sur la commune d'Asnières-sur-Oise, code postal 95000 et des brouettes !!! Elle est à nous ! Promis, juré, craché ! Que je sois changée en korrigan si je mens ! ;-)
(à bientôt quand même, dis...)