Ne pas bloguer, plus précisément. Ou moins.
Parce que je cours après le temps.
Parce que cette rentrée s’apparente à un tapis de course en mode accélération permanente.
Parce que mon boulot me mobilise et me mobilisera au cours des deux mois à venir (au moins) soirs et week-ends, souvent, pour des choses passionnantes, donc tant mieux.
Parce que je n’ai donc pas une seconde pour bloguer du bureau (comme je le faisais fréquemment, j’avoue !), et que même l’heure du déjeuner pendant laquelle je sandwichais ou saladais volontiers devant mon écran, je la consacre désormais à une envie et un plaisir de longue date : apprendre l’espagnol, enfin ! (pas tout à fait TOUS les midis, mais presque)
Parce que ce temps qui me manque pour écrire me manque également pour lire et commenter les blogs que j’aime, les survolant le plus souvent dans mon agrégateur, vite, vite, en me disant qu’il faut que je revienne, un peu plus tard, quand je disposerai de nouveau de cette denrée rare composée de minutes ou d’heures, pour participer au dialogue et à l’échange, composantes indispensables pour moi de la vie de blogueuse. Et puis le temps passe et passe. Même si j’ai toujours considéré le « blogage » - bouh, c’est pas beau – comme une activité où doit régner la plus entière liberté : pas de réciprocité obligatoire des commentaires et des liens, par exemple (Madeleine, si tu passes par là, j'avais aimé chez toi les "10 non-commandements du blog" ou quelque chose d'approchant, inspirés de Pennac, que je n'ai pas réussi à retrouver, si tu peux en mettre le lien dans les commentaires...). Bref, j’ai l’impression d’être un peu lointaine ces temps-ci par rapport à cette « famille » que je ressens comme mienne depuis un an. Je le regrette, mais ce n’est que temporaire… sans doute.
Parce que j’ai aussi fait du blog, des blogs, pendant des mois, un élément central de ma vie, mon compagnon quotidien, soir et matin, m’enthousiasmant pour cette nouveauté, comme à mon habitude, et que j’appuie désormais sur la pédale de frein pour m’y consacrer un peu moins. Il y a dans mon agrégateur aujourd’hui plus de 150 références… Et il y en a tellement d’autres à découvrir ! Comment diable puis-je prétendre lire tout cela , y répondre, écrire chez moi, etc ?… L’impression de trop picorer de-ci de-là, de me disperser, de ne faire que survoler et de délaisser certains à tort ou à raison. J’ai sans doute moins le « feu sacré » du début. Tant pis, tant mieux…
Parce que (et le titre de ce billet est un clin d’œil et une réponse à ceux de mon ami Valclair ces jours-ci), je suis sans doute dans une période « sans ». Sans envie particulière de dire, d’écrire, de creuser à l’intérieur de moi-même à la recherche de… quoi donc, d’ailleurs ? (moi ? tout bêtement ?). Sans doute parce que je vais plutôt bien et que « un bon blogueur est un blogueur malheureux », dixit ma copine C6L, mi-sérieuse, mi-rieuse, comme elle sait l’être, et elle n’a sûrement pas (tout à fait) tort. Je ressens (comme beaucoup, non ?) l’urgence d’écrire quand il y a souffrance, manque, pleurs, peurs, beaucoup moins quand je me sens sereine (presque) et pleine d’énergie comme en ce moment. Et si je suis capable de pondre des pages sur le bonheur d’une odeur ou la beauté d’un brin d’herbe (cela me rappelle quelque chose, Coumarine...), en dehors du fait que je n’en ai vraiment pas le temps en ce moment, cela serait peut-être répétitif et sans grand intérêt passé un moment.
Parce qu’un blogueur que j’aime à retrouver aux Paris-Carnets et dont j’apprécie toujours les propos d’une grande justesse, m’a dit lors de notre dernière conversation que mon blog était « lisse » depuis quelques temps. Et il a raison. Et c’est comme cela que je me sens, d’ailleurs, lisse, délivrée pour l’instant de certains tourments, pour certains récurrents. La solitude paraît moins amère (j’ai surtout moins le temps de m’en rendre compte et d’y réfléchir par trop). Et j’arrive même à apprendre la nouvelle d’une grossesse ou d’une naissance sans avoir l’envie immédiate de me prendre une fieffée cuite. J’ai laissé ici même des souvenirs douloureux ou des échardes de cœur dont je me suis débarrassée de les avoir écrites et partagées.
Parce que si mon blog fonctionne au ralenti, c’est peut-être parce que précisément j’ai fait le tour de certaines questions, ou que je n’ai pas envie d’en faire un leitmotiv stérile, un « fond de commerce » sans fin… Et parce que je sens aussi qu’il me faudrait passer à autre chose, une vitesse différente, nécessitant une impulsion que je ne suis pas sûre d’avoir envie de donner, pas prête à partager pour l’instant des choses peut-être plus sensibles, plus « polémiques » sûrement, moi qui déteste la polémique… Je ne me sens pas capable en ce moment d’écrire certains sentiments profonds, certaines certitudes subtiles susceptibles de donner lieu à un fil de commentaires qui s’apparenterait à un forum, comme j’en vois ici et là, où moult donneurs de leçons persuadés de détenir LA vérité se font plaisir et devoir de démontrer à certains à quel point ils ont tort de penser ce qu’ils pensent. Je ne suis pas prête à cela. Peut-être ne le serai-je jamais. Alors j’attends. L’urgence.
Parce que je sens aussi au tréfonds de moi un germe d’histoire, né il y a longtemps, que je sens croître et bourgeonner et bouillonner depuis quelques temps. Ce bébé-histoire, je le nourris et le protège, surveillant l’arrivée de ses feuilles délicates qui ne vont pas tarder à se déplier, à faire peut-être, si je m’en occupe bien, des fleurs, puis des fruits. Et quand il seront mûrs, je devrai les cueillir, et décider qu’en faire. Et ce printemps n’est pas si loin, et me turlupine car quand il sera là, il y aura urgence à nouveau. A poser les mots sur le papier, à construire et conter. Où ? Ici ? Ailleurs ? Je dois répondre à cette question. Ou me laisser porter, comme je le fais la plupart du temps.
Ce dont je suis sûre, cependant, c’est de ne pas avoir l’envie d’arrêter (et quand bien même je l’aurais, je ne l’annoncerais pas, je me contenterais de ne plus publier, jour après jour, c’est tout). Je ne me sens non plus aucun "devoir" de justifier d’une éventuelle paresse bloguesque chez moi. Juste envie d’expliquer à certains que j’aime les raisons de mon silence inhabituel chez eux, faute de temps. Mais je suis là, bien là, et j’y reste, je lis tant que je peux, même si je me manifeste moins. Mais elles me sont trop précieuses, ces relations de blog, ces rencontres si diverses. Pas question d’y renoncer. Rien que ce week-end, je dois aux blogs un divin dîner indien confectionné avec amitié, des effluves de jasmin, une bague-papillon qui m’émeut, des paroles et des rires. Pour tout ça, même si je me fais plus intermittente, je ne disparaîtrais pas complètement !