Effluves

L'impression de respirer la vie par chaque pore, par mes yeux grands ouverts, par mes bras frissonnants, mon coeur à l'affût du beau, d'une vibration tranquille ou passionnée.

Rentrée étrange, peuplée de souvenirs colorés ou déjà sépias, d'effluves de la vie condensée de mon été 2010. La chaleur tranquille d'un recoin de rocher abrité pour moi seule, au détour d'une petite plage déserte un midi d'août ensoleillé, la voile rouge vif d'un bateau ancien au loin, que je fais semblant de rejoindre de mes brasses paresseuses.

Une nuit tiède sur le toit d'une maison de village, allongés vers le ciel à guetter les étoiles filantes, chacun s'exclamant d'avoir attrapé la sienne, content. Pas d'autre voeu à faire que d'être là en cet instant serein.

Une crique de Méditerranée, minuscule, turquoise et transparente. Assise sur un rocher chaud, je laisse l'eau s'égoutter de mes cheveux et rafraichir mon dos nu, ignorante des voix joyeuses des enfants dans l'eau et des éclaboussures de ballon. Mes pieds nus baignés d'une vague intermittente, je lis Murakami, une grande douceur en moi.

Au bout d'un avion argent, Paris la belle, chez-moi retrouvé. Effluves quotidiennes de fin d'été. Bureau calme encore. Je reprends pied dans une réalité toute autre, retrouve nouvelles du monde et journaux oubliés quelques semaines durant : d'autres effluves soudain. Remugles nauséabonds. J'entends incrédule et impuissante les mots de la haine institutionnalisée d'un pays qui est le mien, cristallisée dans le mépris d'étrangers qui le sont si peu, familles identiques à nos familles. J'ai honte, et peur aussi.

D'autres, ici et , et d'autres encore, expriment mieux que moi la réalité de ces effluves-là qui nous étouffent, analystes de talent là où je ne sais que ressentir sans pouvoir expliquer le malaise et la colère qui me saisissent. Je ne sais mettre sur mon coeur serré que des mots-sensations. Mais je saurai marcher au côté d'autres comme moi qui refusent de voir s'imposer cette haine insidieuse, samedi 4 septembre

Commentaires

1. Le jeudi 2 septembre 2010, 13:25 par Pablo

Je te salue, Traou !

(Est-ce Haruki que tu lisais ? – je suis en manque de Murakami et j'attends avec impatience qu'on traduise son dernier ; ou je m'adonnerai à sa relecture – ).

Moi, j'ai honte (et peur aussi) que d'autres gouvernements de cette Europe qui est la nôtre ne trouvent rien à en dire.

2. Le jeudi 2 septembre 2010, 13:27 par Madeleine

Malaise c'est tout à fait cela ! Une société qui ne me convient pas. Un sentiment d'impuissance ...

3. Le jeudi 2 septembre 2010, 15:32 par Chomp'

Salut Traou :-)

Eh voui, foutre, ça pestile grave, n'est-ce pas ? ...
Tu as pris quelques reserves pendant la "parenthèse estivale" ...
c'est heureux, car comme tu le vois, au retour,
il reste un grand sac de charbon à avaler ...

4. Le vendredi 3 septembre 2010, 08:10 par Anne

Coeur serré oui. Pour le monde, pour la vie perso aussi. J'aurais aimé pouvoir savourer aussi bien que toi l'été pour prendre des forces et affronter le monde...

5. Le vendredi 3 septembre 2010, 22:17 par valclair

Tu as dû voir qu'il y avait un rendez-vous blogueurs à Oberkampf à 13h30. Koz, Fauvette, moi, plein d'autres, y seront. Sans doute à demain donc...

6. Le mardi 7 septembre 2010, 18:06 par Fauvette

Ce fut un grand plaisir de marcher avec toi !
Bises

7. Le jeudi 9 septembre 2010, 20:58 par Traou

Des réponses toujours tardives et un peu à contretemps...

Bonjour ami Pablo, oui c'est Haruki que j'ai découvert cet été. Et j'ai acheté "Kafka sur le rivage" il y a quelques jours. Cela m'intéresserait de connaître ton préféré. Je t'embrasse

Madeleine, une pensée pour toi ici et une chez toi. J'espère que tout va bien pour toi et ta grande...

Hello Chomp', ça pestile mais ça se mobilise, on dirait... on se fait même taper sur les doigts au niveau européen.

Chère Anne, le coeur serré pour toi aussi, et une pensée douce et sincère pour que cet anniversaire soit le tremplin d'une nouvelle et belle page de ta vie. Je vous embrasse fort, toi et Cro-Mignonne.

Chers Valclair et Fauvette, c'était bon de vous retrouver en cette rentrée. A très bientôt.

8. Le vendredi 10 septembre 2010, 11:13 par Pablo

Je crois justement que "Kafka sur le rivage" est peut-être celui que je préfère ! D'un genre "fantastique" assez proche (et avec une quantité de pages comparable ;-) ), j'ai lu, juste après "Kafka...", les "Chroniques de l'oiseau à ressort" (peut-être l'ordre de lecture "convenable" est l'inverse, puisque celui-ci a été publié au Japon 7 ans avant l'autre... ?).

Sinon, avant de lire ces deux romans, j'avais beaucoup aimé "Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil" (1992), que je placerais peut-être en deuxième position dans ma liste personnelle : il s'agit d'une histoire d'amour un peu du même genre que son grand succès "La Ballade de l'impossible", mais peut-être plus profonde et plus riche et encore plus troublante.

En examinant la liste de ses oeuvres dans la Wikipédia en anglais, je me rends compte que je n'ai pas lu ses trois premiers romans, dont le troisième ("La course au mouton sauvage") a été traduit en français et en espagnol : mais les fois où je l'ai feuilleté en librairie je n'ai pas eu trop envie de le lire (je ne m'en souviens pas trop pourquoi). Pfff... mais je m'aperçois juste maintenant qu'il y a un autre roman que je ne connais pas et qui a été traduit en français ! : "Danse danse danse" : je vais y remédier de ce pas ;-)

À part ça, hier j'étais aussi très très content pour la résolution du Parlement Européen qui condamne les déportations du gouvernement français, même si celui-ci avait, hier, l'air de s'en ficher pas mal... Mais au moins c'est un début... !

9. Le vendredi 10 septembre 2010, 16:50 par Traou

"Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil" est celui que j'ai eu le bonheur de lire cet été. Tu comprends pourquoi j'ai envie de continuer...

10. Le mardi 14 septembre 2010, 17:40 par Pablo

Je ne sais pas si j¡ai posté un dernier commentaire ce matin en te disant que les recueils de nouvelles sont bien (en particulier parce qu'elles sont variées), et que parmi ces nouvelles il y en a qui ont donné lieu à des romans... Bonne lecture !