Bleu
Par Traou le vendredi 5 juin 2009, 17:45 - C'est la vie - Lien permanent
Je contemple mon avant-bras bleu et jaune, marbré de marron. Là, à l’intérieur, la peau est d’ordinaire si fine et blanche, presque transparente.
Un gadin majuscule. Accident de tong sur escalier de bois usé-ciré. Dévalé sur les fesses jusqu’au palier salvateur, tentant de me retenir de mon bras nu. Eût-ce été un colimaçon que j’aurais peut-être continué jusqu’en bas, glissant sans secours jusqu’aux tréfonds de la terre.
Aujourd’hui l’hématome m’est amer, journée triste. Hier il me faisait rire, journée gaie. Comme les moindres anecdotes de nos vies prennent les couleurs de nos soucis ou de nos joies, c’est bête au fond.
Une altercation mineure au bureau m’exaspère les nerfs, inutilement, mais je n’arrive pas à « laisser pisser ». Sans doute n’ai-je jamais su faire ça.
Un monsieur dans mes pensées s’avère être accompagné, dans sa vie, déjà, alors je fuis à toutes jambes, pas pour moi, ça. Et j’enlève Fantomette [1] de ce lieu, crainte du ridicule. Je me suis fait des idées. J’ai été bête, je le serai encore.
J’ignore où je serai dans un mois, sur quel décor se fermeront mes yeux le soir. Bientôt plus de maison, pas encore de nouvelle. Inconfortable. Tout ce que je sais, c’est qu’elle ne sera pas en Bretagne. Je n’ai pas trouvé le chemin.
Les vacances sont à portée de pensée. Je les imagine calmes, familiales, amicales, mais toujours pas amoureuses. Et cela m’attriste, cette année encore, pas de main dans la mienne sur les routes du monde ou le cocon de ma maison bretonne. Est-ce que je serai seule désormais toute ma vie ? Ça me fait peur, souvent. Mais je dois bien y être pour quelque chose.
Ce jour est morose. Je me suis enfermée ce midi dans mon restau-refuge, un livre-baume devant mes yeux. C’était « 80 étés » de Jeanne Herry, un talent si doux de phrases simples et sentiments-ancres qu’il m’a tiré des larmes, mi-joie, mi-envie. Que fais-je de mon talent à moi quand d’autres savent si bien l’employer, le livrer ? Avec autant d’évidence et de simplicité. Je hais d’un coup mes circonlocutions et subterfuges de bazar.
Mon corps m’encombre et se déplace sans grâce. Mes pensées tournent dans le mauvais sens et ne produisent rien de bon. J'ai dû me faire un bleu géant à l'intérieur aussi. Je ne m’aime pas beaucoup ce soir. Jusqu'à demain, au moins.
Notes
[1] allusion réservée aux lecteurs d'un billet précédent, mis hors ligne. Merci de vos gentils commentaires en tous cas. Ce furent quelques jours d'une excitation bienvenue, même si elle s'est éteinte aussi vite...
Commentaires
Il n'y a pas de mots pour te "consoler"...
Tu es en souffrance aujourd'hui... je t'ai lue le coeur serré, je (on) aimerais tellement te voir heureuse...
Alors tout simplement, je te serre dans mes bras...
Je te souhaite un demain meilleur. Bisous consolants, dans la mesure du possible...
Des bleus à la belle âme, la couleur des bouleversements... Les bleus deviennent jaunes, couleur du soleil, puis disparaissent sans même laisser de cicatrice... Ton bras ne t'a pas retenu ? aurait il appris le lâcher prise ? sourire ... Il y a toujours un palier pour arrêter la chute, d'ailleurs sur le palier on reprend son souffle avant de repartir... sourire ... Je te fais plein de bises et t'envoie plein de mes sourires de la confiance que j'ai en ton avenir.
Je n'ai pas osé demander pourquoi " Fantômette " avait disparu et je sentais confusément que même Henri ne t'aidait pas complètement ...
Des bisous du soir rien que pour toi Traou
Une pensée douce pour toi que je comprends bien…
Quel mal-élevé aurait bien pu s'étonner de la disparition d'un "billet précédent" ? L'eût il fait, d'ailleurs, que les seuls mots possibles pour ce faire auraient aussitôt confondu le mirage : brillant, éclatant, inattendu, furtif, prometteur, cruel - un éclat de vitre, ou de diamant, une source au milieu d'un désert.
Je t'embrasse !
Zut alors, je l'aimais bien cette pêche qu'on ressentait au billet précédent. C'est vrai qu'on finit par ce demander ce qui ne va pas en soi, alors que peut-être c'est juste une question de circonstances, de coordination qui n'y est pas, ou comme dans ce que tu évoques ici d'arriver trop tard.
Je suis sans doute aussi bien un peu une Fantomette mais qui ignore qu'elle l'est (et ne sais pas trop par où passer pour en avoir con ou in-firmation, bon sang que les humains sont des êtres compliqués).
Ce sont souvent dans ces périodes que ce qui peut s'enchaîner mal le fait avec joie, entre chutes physiques, frictions relationnelles, tracas administratifs (ils adorent, j'ai remarqué se déchaîner dans ces moments-là, méfie-toi et ne perds surtout pas ta carte d'identité).
La Bretagne, ce n'est peut-être que partie remise ? Qui sait si tu ne pourras pas un jour y vivre en tant que scénariste à succès (j'y crois, moi, au moins à ton "olé-olé"). Essaie si tu le peux de garder du coeur pour Paris, c'est quand même un sacré privilège que d'y habiter, et puis aussi ton métier qui possède ses amertumes (ô comme je les comprends, certaines à "l'usine" ressemblaient) mais aussi ses beautés.
C'est déjà demain. Et j'espère que tu te réconcilies un peu avec toi aujourd'hui, tout doucement...
C'est joli pourtant le bleu, mais pas à l'âme, pas sur la peau...
Quand je pense à toi, la lumière m'éclaire. Traou je t'embrasse bien fort.
Bleu présage de jours meilleurs, où le bleu redeviendra lumineux. Patience, courage, gros bisoux.
Je te lis depuis longtemps sans jamais oser laisser de message.... Ce soir tes mots me parlent très fort. Peut-être parce que je suis la maman d'une petite Fantômette, qui aurait pu écrire ton billet. J'ai eu le cœur serré en te lisant. Mais tu sais, à chacun de nous la vie offre parfois des bonheurs par surprise qui guérissent tous nos bleus, ceux de l'âme et du cœur. Je te souhaite de bien belles choses et je t'envoie de douces pensées.
Et dire que j'étais venu poser sur Fantomette mon bon pressentiment ! Je m'en sens presque gêné. Je l'avais eu pourtant très sincèrement sans trop savoir d'où il venait, peut-être parce que je ressentais la puissance de ton attente comme une force qui pourrait tout.
Mais je ne crois pas quant à moi que j'aurais retiré un tel billet parce que l'émotion qui est à sa source est belle et mérite de clignoter en toi même si elle n'était que mirage, nos vies sont faites de mirages aussi, les mirages ne sont pas ce qu'il y a de moins beau.
Mais garde l'espérance et guéris tes bleus. Bon courage chère Traou. Je t'embrasse affectueusement
:
Fertilior seges est alienis semper in agris,
Vicinumque pecus grandius uber habet.
Ovide, Ars Amatoria, I, 349-350
le bien d'autrui nous sourit toujours plus que le nôtre : la moisson nous semble toujours plus riche dans le champ du voisin, et son troupeau plus fécond
(trad. française de M. Nisard, 1838)
(La citation est complètement hors contexte – elle fait partie de conseils sur l'art de la séduction (!) –, mais il me semble qu'elle convient bien à ton état passager de découragement littéraire).
"Mon corps m'encombre et se déplace, sans grâce. Mes pensées tournent dans le mauvais sens...J'ai du me faire un bleu géant, à l'intérieur aussi...Je ne m'aime pas beaucoup, ce soir...".
Ben, dis donc, ma très chère...coup de blues, coup de bleu...!! Le gadin, dans l'escalier,(nous sommes peu de choses..mouarf...!), laisse plus de traces à l'âme qu'au grand navire terrestre, encombrant, parfois...!!
La Bretagne, c'est pas grave, (enfin, moi je dis ça depuis 20 ans...!), (bon, ..., c'est pas grave,...!!), la chaleur d'une main amie, aimante, au soir d"une journée si belle, c'est pas si grave, non plus..ou alors, il faut rabaisser certaines prétentions,(souhaits, désirs, fantasmes...!!!), en ce domaine, et là... j'chuis pas sur, mais il me semblerait que tu fasses un peu trop dans "Le Prince Charmant", Enfin, t'as surement raison, c'est bien, le P.C, à condition que le Prince ne soit pas trop "prince", ni trop "charmant", d'ailleurs,...Bon, là, j'ai l'impression qu'il ne reste qu'une grenouille,... mais quelle grenouille....!!!
On's'connait pas trop, ma belle,, mais,...laisse tomber le "Prince Charmant", ..., ça 'xiste pas, enfin, si..., mais, non!!....
Eheheheheh,... toi qui aimes le bleu... y'a le bleu d'Auvergne..n'importe quoi,...bon , j'arrête....... Bisous!!
Pas le temps ce midi au bureau de répondre à chacun, mais merci de vos messages. Vos mots et pensées me font du bien, et ne vous inquiétez pas trop, vous qui me connaissez pour la plupart, je reprends vite du poil de la bête !
Juste très perplexe, Vieil Anar, qu'est-ce qui peut bien te faire penser que je "fasse un peu trop dans le Prince Charmant" ??? Ma seule "prétention", en ce qui concerne le monsieur dont je parle, serait qu'il n'ait pas déjà quelqu'un dans sa vie, et je n'ai pas envie de rabaisser cette prétention-là, qui n'en est pas une à mes yeux. Je n'appelle pas ça "souhaiter le Prince Charmant", j'appelle ça "éviter d'aller au devant des emmerdes et de se faire très mal"...
@ Traou, ma belle, ce n'était ni agressif, ni réducteur, ...juste amusé et compassionnel...Nan, compassionnel, c'est pour rire..! Juste une petite remarque, qui tient du paradoxe ; ne pas "souhaiter le Prince Charmant", ce n'est pas nécessairement "éviter d'aller au devant des emmerdes et de se faire très mal".
On peut avoir les 2 ou ni l'un, ni l'autre, mais rarement l'un sans l'autre, ...mais c'est peut-être justement ça que tu voulais dire..!
??
Ah si, autre chose , un Prince Charmant, qui n'a pas déjà quelqu'un dans sa vie, soit, c'est louche...soit,...c'est louche..!
Mettons-nous d'accord, Vieil Anar : je veux BIEN le Prince Charmant, ce n'est pas le problème. Ce que je ne veux pas, c'est SA FEMME !!!
(euh, j'ai personne dans ma vie, moi... c'est louche ? Ah ben c'est que je ne dois pas être une Princesse Charmante alors... pauvre de moi, chuis bien barrée)
@ Traou, ah oui, bien sur, ce que tu ne veux pas c'est sa femme, au P.C, mais rassure-toi, elle non plus, elle veut pas...!
S'cuse moi, ma belle, les princesses charmantes, c'est pas pareil, elles ont des fées, comme marraînes et tout et tout et même qui transforment les autres femmes en citrouille et tout,...à moins que ce ne soient...les souris, les carosses..., heu, je sais plus, mais les princesses, c'est pas pareil, elles ont des pantoufles de verre vachtement cassantes, mais en "securit", pour pas se blesser et des Rolex qui sonnent à minuit pile, enfin, c'est pas pareil, tu vois bien...
je ne te connais pas vieil annar, mais j'ai comme envie de te demander de la fermer...
une forte pensee d'empathie envers Fantomette... certains karmas sont plus lourds que d'autres a porter
Ah la la ma chère Traou, je suis triste en lisant ce billet, car je sais ce que tu peux éprouver, ayant moi-même ressenti tellement de solitude affective... jusqu'au jour où...
Comme Valclair, et d'autres, j'avais lu et commenté Fantomette, toujours à guetter le moindre espoir de rencontre amoureuse pour toi, toujours prête à y croire très fort et à m'en réjouir pour toi ! car quand on te connaît IRL on sait que tu le vaux bien !
Je sais aussi que tu es capable de rebondir rapidement, en fait tu es comme moi, tu te régénères à toute vitesse, la vie est tellement puissante. Et je suis d'accord avec toi, même si la solitude, le vide, le manque, sont difficiles à accepter, un monsieur affublé d'une épouse, non merci ! c'est juste bon pour être encore plus dans la solitude : les vacances et les week-end souvent seule, quand tu aimerais être avec lui eh bien il est avec sa femme, tu dois te contenter de quelques rencontres grapillées par-ci par-là, enfin bon très peu pour moi aussi. Après chacun est libre et ressent sûrement différemment les choses, heureusement ! et je ne juge personne, attention ! je connais plusieurs couples procédant ainsi et ça n'entache pas l'affection et le respect que j'ai pour eux.
Allez ma Traou, garde espoir en tout, tu es belle et intelligente, il y en a bien un qui s'en apercevra ! (pffff que les hommes sont donc aveugles parfois ! :))) Je t'embrasse fort.
@ sprite, je ne te connais pas non plus, je vais donc rester poli...! Ce blog, où je ne fais que de rares incursions, étant plutôt, il me semble, celui de la taulière du lieu, en l'occurence, Traou, tu es mal venu(e) d'avoir "comme envie de te (me) demander de la fermer...". J'en resterai donc là, je pense, j'en suis même certain que Traou a beucoup plus d'humour que toi...!
@ Traou, Fantomette, c'était dans une autre vie, non...!?
Evitons autant que faire se peut de se disputer en ce lieu...
Vieil Anar, je pense que Sprite connait ce blog et sa "taulière" mieux que toi sans doute car elle (c'est "elle") me rend visite depuis longtemps et régulièrement. Elle a donc été sans doute aussi perplexe que moi de me voir soupçonnée de "faire un peu trop dans le Prince Charmant", et te dit à sa façon que tu fais tes appréciations un chouïa hâtivement et sans connaître bien le contexte, on dirait...
Et très franchement, même si j'ai pu sembler faire de l'humour sur le sujet, j'avoue que, au fond, ça ne m'a pas fait tant rire que ça. Tu as raison, on s'connaît pas trop, même pas du tout... Et Fantomette, c'était hier, tu sais.
"cela m’attriste, cette année encore, pas de main dans la mienne sur les routes du monde ou le cocon de ma maison bretonne. Est-ce que je serai seule désormais toute ma vie ?"
Oui oui, mais tu as quand même de temps en temps, un compagnon, un ami-amant, pour quelques jours, quelques semaines, quelques mois... c'est déjà pas mal du tout ça !
Moi, c'est rien de rien, et sans doute à vie (ou à mort ;o))
comme d'habitude, j'arrive après la bataille, la reine de la cavalerie inutile. Que dire qui n'est déjà été dit ? Etre seule ou continuer sa vie ainsi, tu sais ce que j'en pense, ce que j'en vis.
Pour la maison, le monsieur et les histoires de bureau, je ne peux pas grand chose. En revanche, il reste un p'tit coin de yourte à partager pour les vacances. Avec ma Grande que tu connais, j'ai l'habitude des voyageuses de Bretagne armées de livres qui ont besoin de calme et de soleil. Même le silence je suis capable de le faire. Alors, si tu voulais venir voir mon ciel, je te montrerai mes iles.
Ps: le livre d'Etty est arivé par hasard dans ma maison par hasard, il y a des livres qui font ça, j'ai pensé à toi
Chacun cherche son chat, et parfois, alors qu'on le croit très loin il est tout près, comment savoir?Tu as raison pourtant, quand on cherche un amoureux "à tout prix", on le paie souvent très cher. Mais pourquoi t'interdire d'en rêver, et pourquoi avoir trucidé cette Fantômette, que j'aurais bien voulu relire? M'en voilà toute frustrée. Crainte du ridicule, dis-tu? Seuls des méchants se moqueraient, et qu'as tu à faire de leur opinion?
Mais je crois comprendre qu'il y a un petit lutin sarcastique à l'intérieur de toi qui se moque quand tu rêves. C'est peut-être lui qui te fait tomber dans les escaliers?
moments difficiles ! je connais ça aussi, ce besoin de partager non assouvi et tout et tout ! il paraît qu'il faut garder le cap, alors gardons le pardi ! un jour viendra ... bientôt surement.... je t'embrasse ...
Poser un jour les armes et les rêves et regarder tout près de soi, dans les grands paniers emplis de nos recherches, parfois vaines, et parfois discrètement fructueuses…
je m'excuse pour cette intervention qui ne me ressemble pas ... j'ai plutot tendance a etre polie, trop, souvent et la fin ne justifie jamais les moyens...
merci Traou d'avoir compris et le ton et le sens de ma maladresse, mais je le ressentais trop fortement...
j'y mettrais plus de forme une autre fois
Ah bin sinon il y a les macarons, aussi. C'est bien, les macarons, pour soigner les bleus, des fois
@ Traou et sprite, je tenais, même tardivement à vous prier de m'excuser, pour le trouble causé, sans intention aucune, j'ai tendance à être plutôt...taquin, je dirais...!! Sans doute un peu trop parfois!!
Encore une fois, mille excuses, j'essaierai de ne plus le faire..