Ouf, ça fait du bien.

Phrase volée au billet du jour de Anne-Chiboum car c’est celle que j’ai pu me dire ces derniers jours en sortant de mon boulot réconfortant.

Vos mots si gentils l’ont été aussi et merci à tous d’être présents pour moi, qui suis si peu présente auprès de vous tous en revanche.

Bon, ce n’est pas la première fois et ça n’arrive pas si souvent, mais j’avoue que le week-end a été empli de pensées moroses voire un peu plus que ça, et que je me suis fais un méga-coup de mou de dimanche soir solitaire. Je hais les dimanches ! Enfin certains.

Pourtant, je suis plutôt d’un naturel positif et j’ai tendance à voir le verre à moitié plein la plupart du temps. Je bataille avec pas mal de succès contre les façons nocives qu’on a parfois de se pourrir la vie soi-même à ressasser stérilement des vieux trucs qui n’ont que l’importance qu’on leur donne. Je me félicite d’être dotée d’un sens de l’humour assez féroce qui me fait voir du drôle au fond des pires trous noirs. J’accepte assez sereinement et placidement que la vie soit ce qu’elle est dans la plupart des cas et le plus souvent je m’en réjouis, même.

Je suis aussi pleinement consciente de la chance qui est la mienne dans plein de domaines, à commencer par le boulot incroyablement gratifiant et intéressant qui est le mien. Pas plus tard qu’hier mes amis, j’ai enchainé professionnellement un déjeuner dans un des plus beaux lieux que je connaisse autour de Paris en compagnie de gens créatifs et passionnants, que j’ai accompagnés ensuite à une visite privée du Louvre le jour de fermeture, privilège royal, émerveillement de salles vides emplies de beauté rien que pour nous (c’est bien la première fois que je vois la Joconde sans 300 têtes de japonais devant moi !). Un bref passage au bureau pour expédier quelques dossiers nécessiteux, et je rejoignais ce petit monde à Pleyel pour un concert divin. Et pas plus tard que vendredi je m’envole pour Rome. Dur métier, non ?

Alors voilà, je suis pleinement consciente que dans mon panier à moi, il y a des trésors comme ça. Et aussi quelques amis chers, une famille qui m’aime même de loin, un appart où je me sens bien, des envies, des projets, le fait de n’être ni malade, ni difforme, et pleinement présente à moi-même. Et une capacité à m’émerveiller et à jouir de la beauté, de l’art, du plaisir simple de vivre, d’un bon vin, d’une caresse, d’une couleur, d’un souffle d’air, d’un ciel de nuages, de ma ville, d’un objet anodin, d’un instant souriant, d’une odeur, d’une saine colère, d’être là.

Privilégiée, immensément, je suis. Je sais. Et pourtant parfois, ça grippe, ça gratte, ça pince, ça pique les yeux, ça serre le cœur, ça noue le ventre, ça donne envie de mourir, ça pue, ça irrite, ça révolte, ça a un sale goût de chagrin, de bonheur interdit, trop lointain, impossible. Pourquoi ?

Pourquoi moi qui me tiens bien plantée sur mes deux jambes la plupart du temps, énergique et vaillante, je tombe au fond du même trou hérissé de pieux cruels chaque fois que je réalise que l’histoire du moment va sans doute s’avérer aussi foireuse que la précédente ? Pourquoi je ne suis pas douée pour ça ? Merde ! Et ça arrive chaque fois à me mettre à genoux. Parce qu’après l’espoir chaque fois de ne l’être plus, je vois se profiler encore le spectre d’une méchante femme revêche et aigrie qui s’appelle « Seule » et qui me fait cauchemarder de devenir celle-là.

Cauchemar qui me fait disparaître sous des oreillers noirs aux relents délétères de « à quoi bon », de ceux qui me font me sentir vieille et laide et inutile. Et stérile et dramatique. Et me feraient voir le rose le plus bonbon en noir charbon.

Heureusement j’ai encore le cœur aux batailles, y compris contre moi-même et mes pentes vertigineuses ou douces vers le malheur. J’arrive à planter un piolet volontaire pour ne pas les dévaler trop loin. Et même, même, je pense arriver à traiter avec humour – grinçant peut-être, mais humour quand même – le malotru charmant qui a pu me faire penser (rêver) quelques temps que peut-être un bonheur à deux dont je commence à oublier le goût était de nouveau à ma portée. Séduisant salaud. Et ce n’est même pas de sa faute. Il n’est pas responsable de mes projections. Je sais.

Alors j’y retourne. Bon gré mal gré et en avalant mes couleuvres à moi. A partir de la semaine prochaine, mon emploi du temps devrait être un peu allégé et peut-être retrouverais-je des chemins bloguesques qui m’ont aidée tant de fois à en adoucir d’autres trop acérés. Les mêmes, souvent, ou qui y ressemblaient fichtrement. Je ne perds pas complètement espoir. Est-ce cela qui me fait vivre ? Je n’exclus même pas de retomber amoureuse. Demain, ou un autre jour.

Commentaires

1. Le mercredi 17 octobre 2007, 23:35 par cledsol

quoi, hier, à Pleyel?? (j'ai même pas fini de lire le billet...) avec l'ouverture du songe de Mendelssohn, l'ouverture de Roméo et Juliette et les airs d'opéras?...

J'étais dans l'orchestre...

2. Le mercredi 17 octobre 2007, 23:51 par cledsol

je suis bien contente si ça va mieux surtout. On passe sa vie à apprendre à vivre... Bises.

3. Le jeudi 18 octobre 2007, 00:34 par telle

Ca fait mal au coeur d'apprendre que tu allais mal ce dimanche et que tu broyais du noir dans ton coin. Je ne sais pas trop quoi te dire de peur d'être maladroite mais bon, je pense à toi et je t'envoie d'amicales pensées.

4. Le jeudi 18 octobre 2007, 02:22 par Minium

C'est assez évident de se dévaloriser, de douter de soi en cas de déception sentimentale. Pourtant, il me semble qu'une rencontre pour une histoire durable ou intense est tellement aléatoire et dépend si peu de nous !

Se rencontrer, être tous les 2 disponibles, attendre la même chose du couple ou de la vie, n'avoir pas de "défaut" rédhibitoire l'un pour l'autre, faire preuve de souplesse tout en restant fidèle à soi-même, ne pas être séparés par le parcours professionnel, les familles, les accidents de la vie... ça me semble ne tenir qu'à un fil fragile.

Ta propension à jouir des bonheurs simples est le meilleur hameçon à compagnons sains et je pense que tu ne dois pas te reprocher des erreurs d'appréciation ;o) ou des coups de blues.

L'amour, ça fait voir la vie en rose ou en noir quelle que soit la situation dans les autres domaines de notre vie mais surtout, il ne faut pas retenir ses élans. Oh oui, vraiment, mieux vaut avoir des remords que des regrets !

5. Le jeudi 18 octobre 2007, 10:01 par Anne

Comme je te comprends. Mais comme notre chère Kozlika me le faisait remarquer, culpabiliser de nos moments noirs, ou d'angoisse, ou de pas bien, c'est juste bête en plus.

Alors autant les prendre avec le plus de philosophie possible, bien sûr.

Quant à l'amour... ah... le problème de l'amour, c'est que par principe, c'est une projection, une cristallisation. Que forcément on voit l'autre au travers du prisme de nos désirs, envies, frustrations. Et même dans le plus bel amour, il y a des grincements.

Tu vois, moi qui penses très fort que l'amour, c'est aussi apprivoiser tout ce qui heurte notre idéal chez l'autre, et bien parfois je me dis qu'en fait il ne faudrait jamais abîmer l'absolu, qu'il faudrait vivre d'amour courtois ou platonique, et le diable sait que je suis pourtant gâtée dans ce domaine.

Mais non. Tomber, se relever, espérer, y croire, être déçu(e), jusqu'à l'histoire qui prend une forme différente, jusqu'à savourer les minutes hors du temps, jusqu'à ce qu'on ait eu finalement raison d'y croire, jusqu'à s'en foutre des chaussettes sales et des caleçons troués de l'autre...

Enfin bref, tu sais tout ça... alors juste bon courage pour le remontage de pente. Et puis je t'embrasse bien fort, aussi.

Et je t'envie aussi fort sur la visite du Louvre, quand même. Peste que tu es de nous narguer comme ça !!!

6. Le jeudi 18 octobre 2007, 10:19 par luciole

Je l'ai trouvée devant ma porte
Un soir, que je rentrais chez moi.
Partout, elle me fait escorte.
Elle est revenue, elle est là,
La renifleuse des amours mortes.
Elle m'a suivie, pas à pas.
La garce, que le Diable l'emporte !
Elle est revenue, elle est là

Avec sa gueule de carême
Avec ses larges yeux cernés,
Elle nous fait le cœur à la traîne,
Elle nous fait le cœur à pleurer,
Elle nous fait des matins blêmes
Et de longues nuits désolées.
La garce ! Elle nous ferait même
L'hiver au plein cœur de l'été.

Dans ta triste robe de moire
Avec tes cheveux mal peignés,
T'as la mine du désespoir,
Tu n'es pas belle à regarder.
Allez, va t-en porter ailleurs
Ta triste gueule de l'ennui.
Je n'ai pas le goût du malheur.
Va t-en voir ailleurs si j'y suis !

Je veux encore rouler des hanches,
Je veux me saouler de printemps,
Je veux m'en payer, des nuits blanches,
A cœur qui bat, à cœur battant.
Avant que sonne l'heure blême
Et jusqu'à mon souffle dernier,
Je veux encore dire "je t'aime"
Et vouloir mourir d'aimer.

Elle a dit : "Ouvre-moi ta porte.
Je t'avais suivie pas à pas.
Je sais que tes amours sont mortes.
Je suis revenue, me voilà.
Ils t'ont récité leurs poèmes,
Tes beaux messieurs, tes beaux enfants,
Tes faux Rimbaud, tes faux Verlaine.
Eh ! bien, c'est fini, maintenant."

Depuis, elle me fait des nuits blanches.
Elle s'est pendue à mon cou,
Elle s'est enroulée à mes genoux.
Partout, elle me fait escorte
Et elle me suit, pas à pas.
Elle m'attend devant ma porte.
Elle est revenue, elle est là,
La solitude, la solitude...

Barbara ... Je n'ai pas trouvé mieux à dire que cet écho immédiat ... Pensée pour toi. bises

7. Le jeudi 18 octobre 2007, 10:49 par Cécile

échouage de baleineau? TT PIS POUR LUI ! ( des bises bretonnes)

8. Le jeudi 18 octobre 2007, 12:10 par cledsol

pas très approprié mon commentaire hier... toutes mes excuses, vraiment, c'est involontaire! A l'inverse de tes billets je m'exprime très mal, et m'en aperçois que trop tard... Bon courage surtout, et plein de pensées, je crois qu'on en a toujours besoin.

9. Le jeudi 18 octobre 2007, 13:10 par Madeleine

Je voudrais te dire que je suis passée, que j'ai lu tes mots, que ça m'emmerde pour toi cette histoire qui ne finit pas bien, que tes derniers mots sont si importants, que tu es une sacrée Nana Traou ! Je t'embrasse très fort.

10. Le jeudi 18 octobre 2007, 13:44 par Traou

Cledsol ne t'excuse de rien, tes commentaires sont toujours appropriés. Merci de tes passages amicaux ici. Et tu piques ma curiosité : oui oui c'était bien le "Shakespeare en musique" que je suis allée voir. Peut-être nos regards se sont-ils croisés, moi au cinquième ou sixième rang et toi où ? Derrière une harpe ? Un violoncelle ?....

Telle merci de tes pensées douces. Le noir s'éclaircit, il est passé au gris, reviendra au rose un de ces quatre, de cela je suis sûre !

C'est vrai Minium, c'est tellement compliqué et rare de tomber sur la bonne personne, le résultat de tant de hasards heureux. Et puis quelquefois, c'est juste "évident", quelles que soient les différences et les obstacles. Je me languis de cette évidence-là, si lointaine dans mon souvenir. Merci à toi.

Anne, ta philosophie met du baume au coeur... de la peste que je suis ! :-) (je vous mettrai une photo incessamment, promis)

C'est une "chanson de chevet" pour moi, Luciole, tu sais, tellement belle même si passablement sans espoir... Il y a celle-là aussi, dont j'avais parlé ici-même il y a deux ans. C'est un thème récurrent de ma vie... C'est aussi pourquoi j'en suis si lasse aujourd'hui.

Ma Cécile, p't'être que le baleineau a été écrasé par un gravillon trop gros ? Tu crois qu'c'est ça ?... ;-)

Merci Madeleine, sur la fin je passe de Barbara à Souchon "On avance, on avance, il faut qu'on avance..." Je continue toujours, allez, mais quelquefois j'en ai juste tellement marre... Heureusement que vous êtes là.

11. Le jeudi 18 octobre 2007, 15:13 par François Granger

Bon, ben des bises, tout plein !

12. Le jeudi 18 octobre 2007, 19:05 par valclair

J'aime beaucoup ce billet Traou qui dit ta lucidité mais surtout ta force inentamée au delà des tourments.
J'y vois aussi des points qui me parlent de façon particulière dans nos différences.
Je te souhaite de très belles journées à Rome, puisque c'est là que te mène ton vol au-dessus des nuages, reviens-en rassérénée.
A bientôt. Bises.

13. Le jeudi 18 octobre 2007, 19:57 par cledsol

tant mieux alors :)

j'étais face au chef, dans la masse des violons ; vers devant, dans la deuxième rangée (avec un voisin qui me parlait ^^). Comme quoi, le hasard!... heureuse que le concert t'aie plu en tout cas. Et bon voyage alors :)

14. Le jeudi 18 octobre 2007, 23:52 par antagonisme

Il y a quelques jours, j'avais aussi un cafard noir, et je suis mariée... Quand ça va pas, ça va pas. mais quand ça va, je me dis qu'il faut profiter de ce qu'on a. Toi, tu es libre et indépendante. C'est génial! Moi, j'ai d'autres avantages, mais j'ai aussi des contraintres et je te jure que je regrette parfois ma solitude... Une femme indépendante, qui mène sa vie... Alors que je fais des tas de concessions qui m'énervent... Je suis sûre qu'il y a du bon dans les deux, l'idéal serait l'alternance... En fait, ce que tu ressens n'est pas si différent de ce que je ressens moi, donc le problème ne se situe peut-être pas exactement là où tu le mets. Bon, en même temps, ce genre de baratin à partir de ce que tu as écrit, c'est hasardeux, je suis peut-être à côté de la plaque. Enfin, je voulais jsute dire qu'on se sent aussi seuls parfois même quand on est avec quelqu'un, et qu'il y a des gens qui ont une propension à la solitude et à l'isolement; et que c'est dur, et je comprends que tu te sentes triste. Je comprends parce que je ressens souvent la même chose, et j'espère que tu vas aller mieux parce que c'est douloureux. Bonne chance.

15. Le vendredi 19 octobre 2007, 04:27 par baïlili

Mais oui, il ne faut jamais baisser les bras et toujours croire à l'amour, qui est là, pas loin, surtout pour ceux qui en ont envie, comme toi et moi.

16. Le vendredi 19 octobre 2007, 11:46 par Pablo

Bon courage, Traou. C'est bien que tu écrives pour exorciser tous ces démons (même si ta douleur reste). J'espère que tu retrouveras bientôt toute ton inspiration (pour l'écriture qui fuit, comme tu disais l'autre jour, et pour la vie en général). Pendant ce temps, la ciel-thérapie et la Rome-thérapie (¿l'arôme-thérapie?), même brèves, vont sans doute t'aider ! Bon courage, Traou.

17. Le vendredi 19 octobre 2007, 21:00 par Yves Duel

Quelle écriture ! Quel talent ! (donc je ne parle pas du reste ...°

18. Le samedi 20 octobre 2007, 00:32 par Fauvette

J'aime ton honnêteté, ta lucidité et ton courage. Tes mots sont beaux, et même si tu es une peste, tu sais nous parler de toi sans te faire valoir, avec pudeur. C'est incroyable la tendresse et l'affection que tu suscites avec tes mots, en te lisant malheureuse un dimanche soir, j'ai envie de sauter dans le métro et de grimper tes escaliers avec une troupe de blogueurs pour partager rires et amitié avec toi. Et chasser ce dimanche noir. Bon séjour à Rome Je t'embrasse bien fort.

19. Le samedi 20 octobre 2007, 20:46 par anita

C'est Devos, je crois, qui disait "un homme fait est un homme fini."
Alors, oui, on pester contre ces trous noirs, mais la perspective d'avoir un jour résolu tous ses conflits, répondu à toutes ses attentes est terrifiante, non? Il me semble, pour mon propre compte, que le bénéfice de l'âge, c'est de savoir qu'on en est pas à notre premier passage à vide, qu'ils cessent un jours, que nous sommes tous des constructions sur pilotis.
Je t'embrasse. Je viens à Paris le WE prochain. Tu veux un goémon?

20. Le dimanche 21 octobre 2007, 16:27 par Traou

Merci les garçons ! François, Valclair, Yves Duel et Pablo, je vous embrasse et à bientôt aux uns et aux autres, Paris-Carnet pour les uns, ballade parisienne ou madrilène pour les autres.

Merci les filles ! Cledsol à l'orchestre, Baïlili au jardin ;-)

Merci antagonisme, oui les situations peuvent être différentes mais les émotions similaires.

Merci Fauvette, partageons rire et amitié bientôt et de visu !

Anita, merci pour la citation de Devos et pour le goémon. Tu me fais signe quand tu es là, que j'en prenne livraison ;-)

21. Le mercredi 24 octobre 2007, 23:05 par osteolala

Et des fois c'est difficile, même à deux.