Aux Champs Elysées, la, la, la...

Hier soir, j’ai fait une expérience inédite : j’ai flâné… sur les Champs Elysées ! J’avais une heure à tuer avant une projection, il faisait beau. Je suis remontée à pied du rond-point à l’Etoile, sans me presser, et me suis même arrêtée sur une terrasse ensoleillée pour y boire une bière (à 5 €, ben voyons !), touriste improbable et étonnée d’être là…

Les Champs Elysées, j’y suis tous les jours, c’est là que se trouve mon bureau. Et très franchement, si on m’avait demandé mon avis, j’aurais préféré un autre quartier de Paris. Avant d’y travailler, c’est un endroit où je ne venais JAMAIS, ou quasiment. Parfois une urgence cadeau le dimanche me poussait jusqu’au mégastore de musique et livres qui y est ouvert non stop, mais aussitôt mon achat effectué et mon petit sac rouge et blanc en mains, je prenais la fuite aussi vite que je le pouvais pour des contrées moins bondées.

Aujourd’hui j’y ai mes habitudes pressées : le M…x ouvert de 9 heures à minuit est bien pratique et le plus mal foutu de la planète, tout de guingois avec des demis et des quarts d’étages reliés par des escaliers encombrés de victuailles et de marchandises, des caissières surmenées et – donc – revêches pour la plupart, un speaker « maquillage » inénarrable qui nous fait des annonces chantantes sur les derniers mascaras et rouges à lèvres de marques grand public, avec un tel enthousiasme suave que je pense qu’il les a tous testés (les fonds de teint marrons quand il rentre des sports d’hiver ou pour le faire croire, ça j’en suis sûre). Les files d’attente aux caisses à l’heure du déjeuner ressemblent à des serpents sans fin, et la dame des bijoux est du genre affable-débordée et les porte tous sur elle…

Juste à côté, il y a donc le mégastore aux sacs rouges et blancs, dans lequel j’essaie désespérément de ne pas claquer mon salaire. C’est un lieu magnifique, gigantesque et majestueux, une ancienne banque, dont la librairie au sous-sol a gardé la porte d’accès aux coffres, énorme, ronde et cuivrée. Je suis une habituée du restaurant-mezzanine du dernier étage où j’organise mes déjeuners-copines, ou bien je vais me réfugier avec un bouquin les midis où j’ai envie d’être tranquille. Certains jours, à l’extérieur, il y a des barrières qui contiennent des foules parfois monstrueuses et excitées parce qu’une « star » vient dédicacer un livre ou un disque : certains chanteurs de d’jeuns dont j’ignore tout, parfois une vieille vedette encore là (Mireille Mathieu pour son dernier album), des auteurs à succès, de romans ou de BD, parfois on frôle l’émeute comme l’autre jour pour le comédien indien Shahrukh Khan : des milliers de fans brandissant son portrait, arrivés là des heures auparavant…

Les Champs Elysées, c’est un univers en soi. Une marée humaine permanente, mouvante et rectiligne, qu’il neige, qu’il pleuve, qu’il vente. Des langues de la terre entière qui se télescopent, des millions d’appareils qui photographient chaque mètre de la « plus belle avenue du monde » (est-ce que le monde entier la qualifie comme ça ou seulement les français ?), des shorts et des marcels en veux-tu en voilà par beau temps, qui côtoient les voiles et abayas des musulmanes, des fast-food de tous genres à côté de quelques boutiques de luxe (plus beaucoup, elles ont émigré dans des rues moins « populaires » pas très loin de là).

Si vous vous promenez du côté impair, aux environs du Fouquet’s (à l’entrée duquel, sont gravés au sol, dans des plaques de métal, les noms des comédiens césarisés) ou de Ladurée (miam, j’y fais provision de macarons bien sûr, et j’y donne mes rendez-vous boulot au petit-déjeuner, autant joindre l’utile à l’agréable), vous croiserez peut-être des japonais souriants et suppliants, prêts à vous glisser dans la main de grosses liasses de billets pour que vous alliez leur acheter portefeuilles et sacs à la monumentale boutique V…n toute proche : il semble qu’ils ne soient autorisés à rapporter chez eux qu’un certain nombre d’articles griffés LV, et vous demandent donc d’aller acheter pour eux le complément. Ils n’ont pas peur, je trouve : je suis sûre que certains « acheteurs » indélicats ont dû filer avec la caisse. C’est sûrement facile, avec le monde qui circule ici. J’ai accepté une fois : j’ai pris l’argent (pas une petite somme), je suis entrée dans la boutique où je n’avais jamais mis les pieds, munie du catalogue où ils m’avaient coché les articles désirés, et j’ai fait demi-tour aussi sec quand on m’a annoncé une heure et demie d’attente ! J’ai rendu les sous à mes pauvres japonais, of course, j’espère qu’ils ont trouvé une autre bonne âme avec du temps à perdre !

Les Champs, c’est marrant, ça change tout le temps : les drapeaux en fonction des visites de chefs d’état, ou pavoisés bleu blanc rouge - comme aujourd’hui - à l’aube des commémorations nationales, les plates-bandes du rond point plantées de sapins enneigés à Noël et de fleurs de saison le reste de l’année. On en a fait un vrai champ une fois avec des épis de blé, ou un stade olympique à l’époque où l’on était candidats... On y défile ou on y fait la fête les soirs de victoire. On les illumine à Noël et c’est toujours si beau, j’avoue. Et aux alentours du 14 juillet, c’est un vrai boucan pendant un jour ou deux quand les avions de chasse qui répètent leur chorégraphie de défilé passent au-dessus de nos têtes.

Je fais parfois un arrêt quand je les traverse (de toute façon, on est quasiment obligé de les traverser en deux fois, les feux rouges durent fort peu de temps : une vieille dame n’a aucune chance d’y arriver en tous cas…), pour admirer l’Obélisque là-bas, avec son chapeau or, et l’Arc de Triomphe aussi, un peu mastoc, mais sympathique. Et je me dis que j’ai sûrement de la chance d’être en ce lieu dont rêvent des gens de par le monde entier…


PS : Je me suis accordé une petite récré-blog ce midi au bureau... J'ajouterai des photos plus tard : impossible de mettre la main sur un câble de téléchargement dans cette maison ! Je vais vraiment dire à Boss que c'est inadmissible : comment puis-je bloguer correctement dans ces conditions ?

Commentaires

1. Le vendredi 5 mai 2006, 15:08 par Anitta

Je te rejoins, Traou ! C'est vrai ça : comment bloguer du boulot si on n'a pas les bons outils ? Cela dit, j'attends les photos sans impatience, la tête déjà emplie des odeurs de parfum du stand Bijouterie... Très beau reportage. Sauf sur un point, que je conteste formellement : le M...x le plus mal foutu de la planète n'est pas sur les Champs, mais à L...e, vers la gare !!

2. Le vendredi 5 mai 2006, 15:11 par Anne

Oui boss, boudiou, comment qu'on fait nous, sans les photos !

Je suis comme toi, je ne suis pas très fan de cette "plus belle avenue du monde". D'ailleurs je préfère les toutes petites rues sineuses, les impasses, les passages, en général.

Et en même temps cette vie étrange hors du quotidien et quasiment 24/24 qui s'y déroule sous nos yeux zébahis, une fois de temps en temps, c'est dépaysant.

Et puis c'est près du Palais de la Découverte, aussi, alors rien que pour ça j'ai quelques indulgences !

3. Le vendredi 5 mai 2006, 17:36 par Lou:)

Et bien moi, qui ne connaîs que très peu Paris, je vais bientôt y bosser aussi, à côté des Champs Elysées et de l'Arc de Triomphe. Et je trouve ça super cool :) Bien sûr, on s'en reparlera peut-être différemment dans un an....

Bises !

4. Le vendredi 5 mai 2006, 18:14 par Laflote

C'est vrai que tu (d)écris bien ce lieu que j'ai bien connu... Lorsque je travaillais à Paris pour la télévision française, dès que nous avions un "micro-trottoir" à faire (ce sont ces petits reportages où l'on pose juste une question à un maximum de gens et sont censés donner une idée de ce que pensent les humains sur tel ou tel sujet), hop nous partions pour les Champs-Elysées... Personellement, je n'y allais jamais autrement. Trop de monde, trop de sollicitations visuelles, auditives, trop de données à traiter en même temps pour mon pauvre petit cerveau tout fragile.

5. Le vendredi 5 mai 2006, 18:21 par Gei

Je suis comme toi, je fréquente très peu les Champs-Elysées de mon plein gré.

Le seul souvenir que j'ai de cette avenue remonte au 14 juillet 1989 (un bail !) : Les gens agglutinés autour de l'avenue commençaient à envahir les corniches des immeubles environnants quand un CRS est arrivé et s'est exclamé, scandalisé, "vous ne pouvez pas faire ça, c'est une banque !"

C'est à ce moment précis que j'ai compris que la révolution n'était pas une commémoration, mais un état d'esprit permanent ! Quoique je pratique beaucoup moins la Kalachnikov que l'Hexar...

6. Le vendredi 5 mai 2006, 19:19 par Traou

@Anitta & Anne : Finalement elles sont moches mes photos... Mais tout le monde sait à quoi ça ressemble les Champs, non ?

@Anitta : Pour le concours du M...x le plus mal foutu, je demande à voir le tien !

@Anne : Et le Grand et le Petit Palais aussi !

@Lou : Quand tu seras là, je t'emmène déjeuner dans ma cantine-mezzanine, alors ! ;-)

@Laflote : Le micro-trottoir a fait partie de mes activités, dans une vie professionnelle antérieure

@Gei : 14 juillet 89, je dois avoir une cassette de ça quelque part ! Je l'ai vu à la télé, à l'époque.

7. Le vendredi 5 mai 2006, 19:19 par obni

Traou > En provincial que je suis, je ne savais pas que nous avions copié le modèle US en ornant nos trottoirs de plaques gravées avec les noms des césarisés.

À l'occasion, Traou, est-ce que tu pourrais mettre en ligne quelques photos de la chose, par simple curiosité de ma part ?

8. Le vendredi 5 mai 2006, 19:22 par Traou

Cher Obni, tes désirs étant des ordres (agréables), je m'en vais bientôt jouer les touristes sur les Champs, en photographiant l'objet (qui fait comme un chemin d'accès au Fouquet's). Mais là, je suis en week-end, pas question de retourner là-bas, ça me rappelle le bureau ! :-)

9. Le vendredi 5 mai 2006, 19:27 par Joël

La dernière fois que je suis allé aux Champs-Élysées, c'était dans le futile espoir de « rencontrer » Shahrukh Khan, je pensais qu'il n'y aurait pas grand monde, mais comme tu le dis, on était pas loin de l'émeute : le bijoutier d'à côté semblait préférer fermer ses grilles, un colis suspect quelques dizaines de mètres plus haut a été explosé (ça fait un de ces bruits, ces mesures de sécurité) ; alors, je me suis enfui...

Je préfère décidément y aller pour des occasions plus feutrées (comme marcher un peu depuis la station F. D. Roosevelt et prendre l'avenue Montaigne pour aller au théâtre).

10. Le vendredi 5 mai 2006, 21:28 par Laflote

AHHH, en fait, j'expliquais parce que tout le monde ne sait pas ce que c'est un "microtrot'..." T'as bossé pour le PAF ? Et pour quel PIF ? OUPS pardon, c'est peut-être indiscret...

11. Le vendredi 5 mai 2006, 22:41 par baïlili

moi non plus, je ne suis pas très fan sauf : - pour le grand magasin de livres, CD,... et sa "cantine" ; - pour la Pizza P..o, ouverte très, très tard dans la nuit, bonne malgrè tout et où on peut, mon Amoureux et moi, aller après le boulot, vers 1h du mat. - au mois de décembre, pour les illuminations ; j'exige des autres et de moi-même au moins un aller-retour un soir de fin d'année... sinon, les M....x sont TOUS mal foutus mais, il faut le reconnaître, bien achalandés !

12. Le samedi 6 mai 2006, 00:19 par c6l

ça existe encore les M...x???( vrai toujours mal fuchus)

13. Le samedi 6 mai 2006, 00:19 par c6l
  • fichus ( décidement)
14. Le samedi 6 mai 2006, 16:36 par obni

Traou > Merci, c'est sympa.

15. Le dimanche 7 mai 2006, 14:37 par Fauvette

Tu décris très bien l'agitation et l'ambiance des Champs. Oh moi qui ai travaillé en banlieue, je peux te dire que j'aurais filé dare dare sur les Champs si cela avait été possible !

Moi j'aime bien aussi le bar du Théâtre du Rond Point en bas des Champs. Même si on ne va pas au théâtre on peut aller boire et manger dans ce lieu le soir, s'installer dans de profonds canapés, et il y a même une petite librairie.

16. Le dimanche 7 mai 2006, 23:41 par Traou

Joël & Fauvette, vous êtes des habitués du Théâtre du Rond-Point, on dirait, c'est vrai qu'il est très agréable (même si j'ai failli partir à l'entracte de la dernièrepièce que j'y ai vu... ça arrive)...

Baïlili, on pourra se faire une virée aux prochaines illuminations de Noël...

C6L, y'a pas de M...x (même mal "fuchus") par chez toi ? ;-) C'est plutôt citadin, en effet...

Fauvette, j'avoue que j'ai moi aussi bossé en banlieue dans des coins paumés et que les Champs c'est quand même mieux (oh la la, oui, quand j'ai échangé un bureau toute seule ou quasiment à Villejuif contre les Champs Elysées, j'étais vraiment contente de cette animation), mais ce n'est pas l'endroit que je préfère dans Paris, c'est ce que je voulais dire...

17. Le lundi 8 mai 2006, 09:52 par Joël

En fait, je parlais du Théâtre des Champs-Élysées où je vais assez régulièrement pour des concerts, de musique baroque la plupart du temps. J'admire au moins autant les musiciens et chanteurs que j'y vois que les stars qui font des signatures au V....n, mais il y a moins à y craindre de débordements !

18. Le lundi 8 mai 2006, 10:47 par Pivoine Blanche

Bonjour Traou, Amusant, (beau aussi), ta description des Champs Elysées. J'y étais samedi dernier, pas ce samedi ci, celui d'avant, à la mauvaise heure... Vers 6 heures, nous étions du côté du Trocadéro, avons pris le métro jusqu'à Franklin Roosevelt, où il était quasi impossible de se mouvoir, tant il y avait de monde, les gens couraient, couraient, couraient (je ne me plaindrai plus jamais du métro de Bruxelles, c'est un monastère zen, là à côté...) et puis, nous sommes arrivés dehors. Au milieu d'une foule énorme. Je dois dire que je n'ai pas vu grand-chose, à part la foule, une des personnes présentes stressait (la peur de ne pas arriver à temps au rendez-vous), une petite vitrine de Guerlain, le temps de rêver à une époque où j'achetais des parfums guerlain (il y a longtemps), la fenac, (mais où étaient les bouquins? J'ai pas trouvé), et mes souvenirs... C'est qu'en 1970, quand j'ai découvert les Champs Elysées, il y avait nettement moins de monde. On mangeait dans un resto-bar très années 70, et c'est là que pour la première fois, j'ai mangé du sorbet citron - un citron givré en fait. Finalement, nous sommes retournées vers le trocadéro (par je ne sais plus quelle avenue (Kléber?) qui part de l'Etoile, je le trouve beau, tout de même ce monument, quand on le voit, on a l'impression de rêver (nous, bruxellois), alors vraiment, on sent qu'on est à Paris et on se rend compte combien on aime Paris (dommage qu'il y ait tant de monde...)

Quand j'avais dix, douze ans, je rêvais d'habiter Paris. J'écrivais un "roman", le roman d'une fille (orpheline évidemment) qui quitte bruxelles pour aller habiter à paris, dans une famille amie. Curieux comme ça nous fait rêver. Et dire que nous ne sommes qu'à 300 km de paris et une heure et quelques minutes en train, désormais.

19. Le mercredi 10 mai 2006, 13:39 par akynou/racontars

Superbe, cette description. On a presque envie d'y aller. et pourtant, j'évite tout ce que je peux… Je ne travaille pas très loin à vol d'oiseau. Mais quand je me balade, je dépasse rarement la place Terne. Au delà, il me faut une super bonne raison (un déj avec Traou par exemple ;-))

20. Le mercredi 10 mai 2006, 22:46 par baïlili

je ne résiste pas à l'envie de t'offrir les paroles de cette chanson !

Je m'baladais sur l'avenue le cœur ouvert à l'inconnu J'avais envie de dire bonjour à n'importe qui N'importe qui et ce fut toi, je t'ai dit n'importe quoi Il suffisait de te parler, pour t'apprivoiser

Aux Champs-Elysées, aux Champs-Elysées Au soleil, sous la pluie, à midi ou à minuit Il y a tout ce que vous voulez aux Champs-Elysées

Tu m'as dit "J'ai rendez-vous dans un sous-sol avec des fous Qui vivent la guitare à la main, du soir au matin" Alors je t'ai accompagnée, on a chanté, on a dansé Et l'on n'a même pas pensé à s'embrasser

Aux Champs-Elysées, aux Champs-Elysées Au soleil, sous la pluie, à midi ou à minuit Il y a tout ce que vous voulez aux Champs-Elysées

Hier soir deux inconnus et ce matin sur l'avenue Deux amoureux tout étourdis par la longue nuit Et de l'Étoile à la Concorde, un orchestre à mille cordes Tous les oiseaux du point du jour chantent l'amour

Aux Champs-Elysées, aux Champs-Elysées Au soleil, sous la pluie, à midi ou à minuit

21. Le jeudi 11 mai 2006, 09:07 par Traou

Et moi, j'aime tant Bruxelles, Pivoine... Ce doit être une ville si agréable à vivre.

Akynou, quand tu seras prête à dépasser la place des Ternes, je serais ravie de t'accueillir dans ma cantine ;-)

Ah, merci, Baïlili, le "la la la" du titre de ce billet faisait référence à cette chanson mais j'ai été trop fainéante pour aller en chercher les paroles moi-même...

22. Le vendredi 12 mai 2006, 16:17 par akynou/racontars

T'es à quel niveau des Champs (ja calcule, je calcule :-)))