"Quelques messages personnels" de Pierre Clémenti

Clémenti Quelqu'un qui sait que j'aime Pierre Clémenti m'a offert ce petit livre. J'en ai acheté deux exemplaires à mon tour ce matin pour l'offrir à des personnes que ces messages personnels toucheront, à n'en pas douter.
En fait, je me rends compte à la lecture de sa filmographie, que j'ai vu peu de ses films, et que j'ai été marquée comme tout le monde par ses deux rôles les plus "grands publics" : l'inquiétant client de Catherine Deneuve dans "Belle de jour" de Bunuel, et l'adolescent candide de "Benjamin ou les mémoires d'un puceau" de Michel Deville. J'ai croisé au détour d'autres films son regard fiévreux et son jeu intense et j'admire qu'il ait choisi d'autres chemins que celui qu'offrait le cinéma commercial à son physique de jeune premier. Il fut, avec Jean-Pierre Kalfon et Bulle Ogier, le défenseur d'un théâtre et d'un cinéma volontairement éloignés des sirènes commerciales de la gloire.

Le livre a été écrit pendant les 18 mois de son incarcération à Rome, alors qu'il avait été arrêté chez lui pour détention de drogues. Je m'attendais, étant donné le personnage et le contexte de ce livre, à y trouver une écriture peut-être violente et désordonnée, je ne sais pourquoi.... Ses mots sont au contraire clairs, limpides, posés, même lorsqu'ils dénoncent plutôt violemment - et c'est le sujet principal du livre - le système carcéral italien, et de façon générale ce que l'enfermement forcé fait des hommes....

L'écriture est simple et belle et j'avais presque l'impression de l'entendre dire ces mots, ceux d'un acteur, d'un artiste tel qu'il l'entendait : "Je pense que l'art doit être au service du peuple, et c'est pourquoi il me semble qu'il est inconciliable avec le statut de l'idole, qui est au-dessus du peuple, qui le domine et l'humilie, qui se fait servir par lui. Je vois l'artiste comme un ouvrier parmi les autres. Il doit accomplir sa tâche quotidienne, de représenter les joies et les souffrances , avec sérieux et humilité."
A l'ère d'émissions télé dont le but semble être de mettre à la une de magazines-poubelles des candidats éphémères, à peine ont-ils chanté (braillé serait plus juste) la moindre note à une heure de grande écoute, cela fait rêver....

Ces pages sont principalement la chronique de sa révolte face à l'injustice de son incarcération, de son incompréhension et de son abattement parfois. Il y a aussi au détour d'une page l'évocation de ses débuts, de beaux portraits de Bunuel, de Fellini à qui il refusât un rôle mais qui vint témoigner pour lui au procès.

Celui qui fut Jésus pour Philippe Garrel, l'Ange de la Mort pour Bunuel, et un cannibale pour Pasolini et Liliana Cavani, est mort en décembre 1999, le lendemain de la tempête. En 1971, en prison, il écrivait à une amie : "Depuis ma naissance, je poursuis, solitaire, la recherche du sens de ce merveilleux voyage que tous les hommes commencent à leur naissance."
Je ne sais s'il avait trouvé....

Commentaires

1. Le mardi 22 août 2006, 22:19 par Meerkat

Bonjour Traou, Je me demande si c'est possible que ça marche, un message sur un ancien billet ? Essayons ! C'est Pierre Clementi qui m'incite à vous faire signe, ajouté à ce que j'ai pu entrevoir de vous sur votre blog. Ah Pierre Clementi... Un vrai amour de jeunesse pour moi, dont j'ai toujours plus ou moins suivi le parcours. Un personnage bien séduisant. Et ça me fait penser que quelque part, dans mes livres, je dois avoir plein de photos de lui découpées. Je suis émue de revivre ces souvenirs. A bientôt.

2. Le mercredi 23 août 2006, 07:32 par Traou

Bonjour Meerkat et bienvenue ici. (bien sûr ça "marche" un commentaire sur un ancien billet ;-)) Moi aussi, j'étais très "émue" par Pierre Clémenti quand j'étais plus jeune, ce livre m'a offert une autre facette de lui, une écriture très pure... A bientôt