Cannes – session 2011

Bon, j'ai loupé le coche : je voulais publier ce billet avant le palmarès et me suis fait avoir par le temps, l'envie de mettre des photos qui sont restées coincées dans mon téléphone, etc... Alors voilà : billet écrit il y a quelques jours dans le train du retour de Cannes, garanti sans retouches après Palme...

Il y a quelques années que je viens chaque joli mois de mai trainer mes guêtres sur la Croisette. Avec, finalement, je ne l’aurais jamais cru, de plus en plus de plaisir. Et oui.

D’abord parce que Cannes est toujours l’antichambre de l’été : premier soleil, première mer bleue (bon, sans marée, donc ce n’est pas VRAIMENT la mer, les bretons me comprendront, les autres pesteront, j’assume :-) ). C’est la première fois de l’année que j’arbore sandales sur pieds vernis de frais, tenues légères exhumées des longues boites où elles dormaient sous mon lit en attendant leur heure, couleurs pastels un peu raccord avec ma peau blanche à peine sortie de l’hiver (j’ai fait la bêtise de tester l’autobronzant soi-disant « sans marques et sans odeur », c’est un mensonge éhonté ! Il pue et fait autant de trainées orange que les autres : poubelle donc, et blanche je resterai… du moins dès que les trainées auront disparu).

Et puis les années passant, je prends mon rythme ici, j’y connais plus de monde, j’y retrouve des visages familiers ou des nouveaux présentés par les précédents, façon boule de neige, et j’aime ça. Je retrouve dans les journaux quotidiens du Festival des têtes croisées depuis quelques années avec de jolis projets qui ont fini par émerger et se faire et je m’en réjouis pour nombre d’entre eux.

Je fais partie de la tranche des festivaliers à contretemps des fêtards : nous nous couchons et nous levons tôt, préférant les projections matinales aux fêtes jusqu’à l’aube, puisqu’à l’aube nous nous levons. J’ai ainsi pu admirer ces deux derniers jours – aux séances de 8h30 du Palais, auxquelles il n’est de surcroît pas nécessaire d’arborer robe de princesse et talons plus ou moins aiguilles, confort appréciable – deux films fort différents et magnifiques chacun dans son genre : « The Artist » de Michel Hazanavicius, superbe hommage au cinéma, 1h40 de pur plaisir et de talent (Dujardin est définitivement un superbe acteur), c’est muet, c’est en noir et blanc, c’est plein de grâce, d’humour et d’émotion, bravo !

Et un autre matin, le toujours étrange Terrence Mallick m’a saisie au cœur, alors que je ne suis pas forcément la plus fervente adepte de son cinéma, je l’avoue. J’ai quand même trouvé la première demi-heure de « The Tree of Life » parfaitement insupportable, et ai eu grande envie de quitter la salle comme l’ont d’ailleurs fait quelques-uns, exaspérés sans doute comme moi par la succession interminable d’images de nature, d’eau, de ciel, de planètes, d’étoiles, de dunes, que sais-je encore, à mi-chemin entre « La Terre vue du ciel », « Océans » et même « Jurassic Park » !... Exaspérée, vous dis-je. Et puis, et puis on revient à l’histoire « simple » d’une famille des années 50, Le père, sévère et brusque jusque dans l’expression de l’amour à ses enfants (étonnant Brad Pitt), la mère, tendre et silencieuse, et les trois garçons, dont l’un plus frondeur et révolté contre son père que les autres. J’ai été touchée au plus profond de mes émotions par la peinture délicate de l’amour infini pour l’enfant tout juste né, les souvenirs créés de premiers pas maladroits, de jeux, de petites coutumes, de lumière irisée et du sentiment mensonger que ce bonheur sensuel est et sera. Jusqu’à la peur qui vient, la violence, le déchirement de la perte. J’ai aimé tout ce qui n’était que vie dans ce film, et je laisserai volontiers de côté les dispersions oniriques du réalisateur qui me sont personnellement bien inutiles pour éprouver l’émotion de l’histoire.

Quoi d’autre : « 17 filles », beau premier film de deux soeurs, Delphine et Muriel Coulin, tourné à Lorient, avec un casting étonnant d’adolescentes, et un sujet insensé (tiré d’une histoire réelle) auquel on croit avec ses touchantes héroïnes, traité avec douceur et humanité.

J'ai vu aussi "The Beaver" ("Le complexe du castor" en français), à qui je n'accorderai au fond que la sympathie que j'ai pour Jodie Foster, car malgré son sujet incongru, il m'a paru finalement assez "formaté", ce qui m'étonne de la part de sa réalisatrice.

Sinon, beaucoup de nourriture délicieuse, un feu d'artifice tiré sur la mer et contemplé d'une terrasse tiède, un verre de champagne à la main, de beaux projets racontés par de belles personnes. Je fais un métier très agréable, j'en suis consciente, et pas seulement à Cannes, d'ailleurs.

images.jpg

Commentaires

1. Le lundi 23 mai 2011, 08:30 par Anne

Aucun commentaire sur la mer. D'abord parce que oui, il y a des marées en méditerrannée, mais des petites, du genre : t'es pas obligée de regarder le calendrier pour aller te baigner. Ah mais c'est vrai, vous, de toute façon, elle est trop froide !!

:-p

En tout cas j'aime tes récits Cannois. On y sent le vrai plaisir de cinéphile, loin des who's who de tant d'autres festivaliers...

2. Le dimanche 29 mai 2011, 23:55 par Fauvette

J'attendais (fermement) ton billet cannois !
Et ne suis pas déçue, ta petite touche personnelle complète bien tout ce que j'ai pu lire, entendu ou vu, merci !
Et le film de Kaurismaki (zut je ne suis pas sûr de l'orthographe !) ?
Et Guédiguian ?

Bises et à très bientôt.