Inde 2è - Auroville

Je quitte Varanasi/Bénarès à regret.

Direction Chennai (anciennement Madras), à trois heures d’avion de là, où je ne m’arrêterai pas. Une voiture m’attend à l’aéroport. Quatre/cinq heures de route en direction de Pondichéry. Je fais halte une dizaine de kilomètres avant. Ma destination finale s’appelle Auroville. Les désirs de Fauvette étant des ordres :-) voici une carte avec mon itinéraire depuis le début.

carte Inde

J’ignorais tout d’Auroville il y a encore quelques mois. J’avais envie de me reposer un peu après mon trimestre trépidant et des amis familiers de la région m’avaient conseillé quelques guest-houses tranquilles dans les arbres ou sur la plage. Exactement ce qu’il me fallait.

J’ai entendu beaucoup de choses sur Auroville avant d’y aller. L’assertion revenant la plus souvent étant : « C’est une secte ! », ce contre quoi je m’insurge absolument. J’ai noté que ceux qui m’en ont parlé le plus négativement étaient le plus souvent, d'ailleurs, ceux qui n’y avaient jamais mis les pieds…

Auroville est une sorte d’utopie à l’œuvre. Une ville créée de toutes pièces il y a près de 40 ans à l’initiative de « La Mère », la compagne de Sri Aurobindo dont l’ashram est à Pondichéry, et qui lui donne son nom. Elle a été inaugurée le 28 février 1968 en présence de représentants de 124 pays et de 23 états de l'Inde, lesquels avaient apporté chacun une poignée de terre de leur pays, rassemblées dans une urne au centre d’Auroville, pour signifier que la ville n'appartiendrait à aucune nation en particulier mais à l'ensemble de l'humanité. Cette expérience communautaire est reconnue par l'Unesco.

Sur le site internet d'Auroville, on lit en introduction ce résumé du projet aurovillien :

"Auroville se veut une cité universelle où hommes et femmes de tous pays doivent pouvoir vivre en paix et en harmonie progressive, au-dessus de toute croyance, de toute politique et de toute nationalité. Le but d'Auroville est de réaliser l'unité humaine."

Concrètement, les habitants, regroupés en communautés, centrent leurs activités et leurs recherches sur la régénération de l'environnement, l'agriculture organique, l'énergie renouvelable, le développement des villages, l'artisanat, les soins de santé les échanges interculturels... Au coeur de l'expérience aurovillienne : la recherche d'une économie sans argent et d'une organisation sans hiérarchie...

La ville a été construite sur le modèle d’une galaxie, rayonnant à partir d’un centre occupé par le « Matrimandir », "l'âme" d'Auroville, un lieu de méditation et de recueillement, qui n'est relié à aucune religion. Son nom même renvoie à l'idée de "mère universelle". Quant à la symbolique de sa construction, des 12 "pétales" qui l'entourent, je vous renvoie au site d'Auroville pour de plus amples explications, c'est assez long et complexe.

maquette Auroville

En haut du Matrimandir, qui ressemble quand même fichtrement à une balle de golf dorée (c'est vraiment de l'or, au fait : un système exclusif et allemand qui insère une feuille d'or entre deux plaques de verre), on trouve la "chambre intérieure", à laquelle on ne peut accéder que si l'on est résident d'Auroville, et après une session d'information au visitor's center (une expo, un petit film, une première simple visite des jardins, ensuite on a le droit de prendre rendez-vous pour le jour d'après, ça se mérite). Il s'agit d'une pièce toute blanche, construite d'après une vision de la Mère, sans fleurs, ni statues, ni encens, rien que le silence et le blanc. On distribue des chaussettes blanches à tous les visiteurs et on est priés de ne toucher à rien... A l'intérieur de cette pièce circulaire, 12 piliers blancs en cercle, et au centre, une énorme boule de cristal capte la lumière du soleil qui tombe à la verticale du plafond ouvert sur l'extérieur. C'est très beau. Et sûrement très serein quand il n'y a pas de marteaux-piqueurs tout autour ! (ils essaient de finir le Matrimandir pour le 40è anniversaire, l'année prochaine, il est en travaux depuis plus de 30 ans...). J'y ai connu quelques secondes d'un silence rare et appréciable, quand même.

Matrimandir

A Auroville on peut prendre des cours de tai-chi, de yoga "intégral" (celui d'Aurobindo, "qui commence là où le yoga finit", ne m'en demandez pas plus, je connais très mal Aurobindo et ne pratique pas le yoga, ni intégral ni autre), on peut faire des sessions de "danse intégration avec les 5 éléments", de "Vedic mathematics" et de "Vedic astrology". On y croise des masseurs ayurvédiques et des lecteurs d'aura. Tout est orienté partout pour le bien-être et l'éveil du corps, de l'âme, des sens, de la conscience... Bon, il faut être un peu branché sur ce genre de disciplines, sinon je conçois que ça puisse faire sourire. J'avoue que moi-même la danse avec les cocotiers, les oiseaux et le sable... (authentique).

La ville était prévue au départ pour accueillir 50 000 habitants. Ils sont aujourd’hui… 1 800. Et c’est peut-être là que le bât blesse et que la question se pose : 40 ans après, doit-on considérer Auroville comme un échec, à l’aune de son peu de fréquentation ?

J’ai passé une semaine entière à Auroville. C’est trop peu, sans doute pour se rendre vraiment compte, mais j’en garde un sentiment mitigé : j’ai trouvé là le havre de paix que je cherchais, une petite maison perdue au milieu des arbres, la mer pas très loin. J’y ai rencontré des êtres humains formidables, accueillants et généreux, au cœur de très réelles et sincères démarches spirituelles, désireux de faire d’Auroville un modèle d’humanité et s’y employant.

Je pense qu’Auroville a une réelle influence positive sur son environnement, avec notamment une aide à la scolarisation ou l’équipement des villages alentours. La ville et ses infrastructures ont également créé des emplois pour la population locale. Il y a là un vrai projet de vie, un projet écologique, social, humain. Mais…

Mais j’avoue que j’ai été quelque peu dérangée par le déséquilibre que l’on observe un peu partout à Auroville : Il y a là-bas des maisons fabuleuses, grandes, belles, perdues dans la nature, aux architectures parfois fantasques ou spectaculaires. Ceux qui les habitent sont des occidentaux en majeure partie : canadiens, allemands, italiens, français, hollandais, etc… Et les indiens occupent les emplois d’intendance, sont à leur service. Certains jours, au-delà de la fraternité qui a l’air de régner en ce lieu la plus grande partie du temps (ce sont des humains, aussi, il y a des frictions comme partout), je me suis surprise à me demander si ce projet n’était pas après tout une autre forme de colonisation…

Et je n’ai pu m’empêcher de me demander aussi s’il était bien nécessaire d’investir les sommes folles qui ont sûrement été englouties dans l’achat des terres et la construction des édifices communs, en particulier le Matrimandir, pour ce qui n’est somme toute désormais qu’un village de moins de 2000 âmes et donc pas du tout la ville qui était prévue au départ… Même s'il s'agit de donations privées. Je suis un peu perplexe, j’avoue.

Je ne crois pas que je retournerai à Auroville. J'y ai trouvé le calme, un cadre magnifique. Je ne dédaigne pas de trouver un paon perché devant ma porte quand je me lève le matin. J'y ai croisé de beaux êtres qui m'ont parlé avec émotion et sincérité de leur expérience et de leur foi en ce projet que certains accompagnaient depuis l'origine, leurs enfants et petits-enfants nés à Auroville.

paon

Mais ce n'est pas l'Inde. C'est une parenthèse en Inde, une enclave à part et coupée du reste du pays. Si je retourne en Inde, ce sera à Bénarès ou d'autres endroits qui me parlent plus. D'Auroville, je garderai quand même l'image d'un arbre sans âge que je ne connaissais pas : le banyan qui marque le centre d'Auroville, juste à côté du Matrimandir. Cet arbre est symbole d'éternité car quand une de ses branches qui ploie touche le sol, elle y plonge et y fait naître les racines d'un nouvel arbre. Un banyan est donc entouré d'une forêt de ses "enfants" tous reliés à lui et qui vont eux-mêmes s'étendre à l'infini. J'ai trouvé à l'ombre de cet arbre un calme plus grand que dans la chambre de méditation.

Banyan

Et plus proche de la vie de l'Inde que j'aime côtoyer, je garderai l'image de ma petite choupette vendeuse de poissons plein de mouches, sur la route de la mer, que mettait en joie les photos d'elle que je lui montrais sur le petit écran de mon appareil. Ma dernière et plus jolie image de l'Inde.

marchande de poissons

Commentaires

1. Le vendredi 2 mars 2007, 09:08 par Swâmi Petaramesh

Passionnant article, d'une très grande justesse et sensibilité, comme d'habitude avec ce que tu écris, Traou. Je commente rarement, mais c'est toujours un peu pour dire la même chose :-} Tu m'impressionnes à chaque fois.

A lire de Srî Aurobindo, son plus gros ouvrage : "La vie divine" (4 tomes). Je dois avouer n'être pas parvenu jusqu'ici à dépasser la moitié du tome 1, mais il faut également croire que je n'avais pas vraiment "la tête à ça".

Le théories fondamentales d'Aurobindo et de Mère sont quelque peu "étranges" et vont au-delà, avec le "yoga intégral", de la tradition du Vedanta et de l'Advaïta, et des enseignements traditionnels.

Un des disciples français d'Aurobindo et de Mère les plus connus est Satprem.

Ceux qui veulent en savoir plus peuvent également jeter un coup d'oeil à L'Institut de Recherches Evolutives et se faire leur propre opinion.

2. Le vendredi 2 mars 2007, 10:31 par céleste

Amoureuse de l'Inde, où j'ai fait différents voyages, je partage tout à fait cette analyse sur Auroreville. véritable hâvre de paix, d'écologie et de bien être....pour des occidentaux. comme vous le soulignez, ce n'est pas l'Inde. Nous avons passé deux semaines à Pondichérry, et avons visité Auroreville, nous y sommes allés à la plage, mais avons préféré loger dans une guesthouse de Pondy, fréquentée par des touristes indiens. Auroreville a quelque chose d'arificiel, par rapport à la réalité indienne. un jeune indien travaillant dans un restaurant de Pondy m'avait dit que sur la plage d'auroreville, un panneau, écrit en tamil, en interdit l'accès aux autocthones.

L'idée de départ est très belle, la réalisation, plus discutable, mais les bénéfices des ateliers sont toujours destinés à l'aide à la population.

en gros, effectivement un bilan mitigé. l'été prochain , je retournerai à Pondy, que j'aime beaucoup. J'aime la promenade où, vers 6 heures, tous les matins, les indiens marchent pour bien commencer la journée, et à nouveau le soir pour flâner en compagnie. nous y avons fait des rencontres passionnantes.

la lecture de cet article réveille plein de souvenirs, merci.

3. Le vendredi 2 mars 2007, 11:42 par Traou

Merci pour ces infos, Swâmi, je me doutais que tu en connaitrais un rayon de plus que moi sur le sujet... ;-) J'ai tenté moi aussi la lecture d'Aurobindo il y a quelques années et j'ai renoncé... Je n'étais peut-être pas prête, il faudrait que je re-essaye. Quant à la Mère, je n'ai pas accroché avec ses écrits et déclarations qu'on trouve à chaque coin d'Auroville. Et heureusement que j'ai rencontré là-bas des gens qui l'ont connue et m'ont dit à quel point elle était un être plein d'amour car j'avoue que son regard, sur les portraits géants que l'on trouve d'elle dans chaque maison aurovillienne, me faisait plutôt froid dans le dos...

4. Le vendredi 2 mars 2007, 11:46 par Swâmi Petaramesh

Moui. Comme toi, j'ai des doutes. Douter, c'est très bon pour la santé ;-)

5. Le vendredi 2 mars 2007, 12:08 par Traou

Bonjour Céleste et bienvenue ici. Votre commentaire avait été spamplemoussé... Via Swâmi, j'ai déjà eu l'occasion de rendre visite et de lire les récits indiens de "Célestissima". Pas tous encore... A bientôt donc, avec plaisir, ici ou là-bas.

6. Le vendredi 2 mars 2007, 12:56 par Bailili

Très étonnant ce que nous décrit là. Je n'avais jamais entendu parler d'Auroville. Je crois que, même si on n'est pas convaincu, ça mérite d'être visité.

7. Le vendredi 2 mars 2007, 13:29 par Fauvette

Merci Traou, pour ce billet très sensible, mais aussi pour la carte ! (c'est sympa, je visualise ton trajet). Dans les années 70 lorsque j'étais en fac à Poitiers, des conférences avaient lieu pour nous présenter Auroville, recueillir des fonds, et éventuellement nous recruter. Comme j'avais une unité de valeur (u.v. que l'on appelle maintenant module !) sur l'utopie, je m'étais bien sûr intéressée au sujet !

C'est vrai c'est en Inde, mais en fait Auroville pourrait se trouver n'importe où ailleurs, je suis d'accord avec toi. Mais le récit de ton séjour est vraiment intéressant, tu as le recul nécessaire pour garder un oeil critique.

Elle est mignonne et touchante ta petite marchande de poissons, oui pour moi aussi elle représente plus l'Inde qu'Auroville !

A bientôt. Et gros bisous.

8. Le vendredi 2 mars 2007, 13:47 par Swâmi Petaramesh

On trouve également hélas, sur le site d'Auroville, quelques éléments de nature à donner à réfléchir aux féministes occidentaux(-tales) de tout poil : Il n'est pas certain que dansce paradisiaque havre de paix et d'unité humaine, la condition féminine soit aussi enviable que dans n'importe lequel de nos non-paradisiaques patelins. Extraits de la page que je pointe :

  • As there have been occasional incidents on the roads over the years, women are specially advised not to walk or cycle alone anywhere after dark.
  • Please, respect the local customs regarding behaviour. Also, noting that Indian women generally dress very modestly, Western women are specially advised to dress in a similar fashion, in order not to send out the wrong message and attract unwanted attention. This also applies at the beach, where one-piece swimming costumes are advised.

Ce n'est peut-être pas l'Arabie Saoudite, mais ça douche un peu, tout de même... Cela dit, cela montre simplement que de ce point de vue, et malgré sa forte "occidentalisation", Auroville n'est probablement pas très différente du reste de l'Inde en matière de moeurs... Auroville est une ville indienne, où les moeurs, us et coutumes indiennes prévalent, le message est clair : ne pas aller y faire du tourisme comme au bord de la piscine derrière les hauts murs de l'Hotel-Club à Djerba.

Même dans un "havre de paix et de liberté", cette dernière connaît ses limites, si souvent hélas liées à la vision du corps de la femme et à sa sécurité...

Mais je ne fais cette remarque qu'à la lecture des avertissements faits sur le site "officiel" d'Auroville. Traou, qui s'y est physiquement rendue, a peut-être des commentaires plus pertinents à faire à ce propos...?

P.S. : Traou, l'image "Auroville vue du ciel" que tu donnes ci-dessus semble furieusement être celle d'une maquette, et non pas une photographie aérienne. Je serais curieux de savoir ce qu'il en est de la construction de la ville véritable et non pas de la maquette (en dehors du Matrimandir)...

9. Le vendredi 2 mars 2007, 15:28 par claude

Je vois avec satisfaction que les travaux ont bien avancé depuis ma visite en 1992. La date de mise en chantier n'est pas anodine: 1968. Ce fut l'époque où des vagues successives ébranlèrent nos civilisations occidentales, l'une d'elles, bien lointaine et artificielle, fut cet avatar qu'est Auroville qui s'inscrit dans une conception du monde que quelque uns regroupèrent sous le vocable de réalisme fantastique Cette démarche est bien passée de mode aujourd'hui. Je la retrouve avec un brin de nostalgie chez les brocanteurs et la revue Planète de ces années là et dans les pages oubliées du "Matin des magiciens" car elle m'a fait rêver dans ces années là Le design de la cité en forme de bras spirales galactiques marque la volonté de s'inscrire dans un vision universelle où l'homme est forcément à sa place Sa position correspond à un rêve fait par la mère qui était française et compagne de Sri Aurobindo A sa mort, les choses se sont gâtées et les rapports entre Ashram et cité parfaite sont devenus execrables On peut effectivement comme tu le fais se poser des questions quant au financement mais aussi à la faculté qu'on les membres à résider en permanence sans passeport indien dans un pays très sourcilleux sur ce sujet. Je sais qu'à ses débuts, Auroville a bénéficié d'une aide efficace de la famille Gandhi qui semble se prolonger jusqu'à nos jours Il serait aussi important de savoir comment les enfants et les petits enfants d'Aurovilliens s'intègrent à cette structure (Quand j'étais là-bas, on célébrait dèjà des mariages entre eux de ces citoyens du monde, comme ils se dénomment) Et tu as raison de souligner que tout ça n'est pas la vraie Inde et est avant tout une façon de panser les plaies existentielles dOccidentaux dotés en général de gros moyens Si tu es toujours intéressée par ce pays de contraste, tu devrais poursuivre ton voyage jusqu'à Leh et le Ladakh (mais attention à la saison car à 4000m d'altitude, les nuits sont fraiches). Tu verras là-bas comment les pierres savent flamboyer, les moulins à prières chanter dans de sublimes lamaseries et le léopard des neiges feuler dans des vallées sans nom Je te souhaite de beaux rêves

Claude

P: Tu as raison d'avoir des doutes sur la douceur supposée de la "mère"


						
10. Le vendredi 2 mars 2007, 15:36 par claude

ben, j'ai du oublier une ligne entre les paragraphes, ça donne l'impression d'un truc interminable mon com Tu peux supprimer, hein! Je ne serai pas fâché ;-)

11. Le vendredi 2 mars 2007, 16:01 par Traou

Effectivement, l'image "aérienne" d'Auroville est celle d'une maquette, j'aurais dû le préciser. Et d'une maquette du projet de départ... Il y a certaines terres qui n'ont pu être acquises, et plein de constructions qui n'ont pas vu le jour, faute d'occupants...

Quant aux "mises en garde" à l'égard des femmes à Auroville, elles sont extrêmement pertinentes de mon point de vue, eu égard aux coutumes indiennes. Il faudra que je fasse un billet un jour peut-être pour expliquer mon "absence" de féminisme au regard de certaines images qui choquent ici (je me fous éperdument des corps nus ou en porte-jarretelles pour vendre quoi que ce soit...). En revanche, je suis extrêmement respectueuse des traditions différentes des nôtres en Inde, dans la mesure où elles ne sont pas une contrainte absolue mais juste une façon de se conformer à un mode de vie. J'avoue que quand il m'est arrivé de voir quelques - rares - filles européennes se balader dans les rues de Pondichéry avec des shorts au ras des fesses et des débardeurs très échancrés, j'étais moi-même choquée de ce manque de connaissance et de respect des traditions du pays qui les accueillait...

En Inde, on peut montrer son ventre tant qu'on veut, ce n'est pas un endroit du corps considéré comme érotique et les saris et cholits le dévoilent amplement chez les femmes de tous âges, ce qui peut parfois nous paraître étrange voire choquant. En revanche, on ne montre pas ses épaules ni ses jambes, et on habille ses chevilles de chaînettes d'or ou d'argent, car il s'agit d'une partie du corps extrêmement érotisée... C'est comme ça.

De la même façon, quand je suis en Inde, j'attache généralement mes cheveux, car je sais que leur exubérance est choquante pour les indiens. L'année dernière, dans la famille indienne qui m'accueillait, j'avais mis quelques jours à comprendre cela et je me souviens du plaisir qu'avaient manifesté les grands-parents quand je les avais attachés enfin, même s'ils ont toujours été extrêmement affectueux avec moi, même mes boucles à l'air libre. De même, j'essaie de porter des vêtements amples à l'indienne pour me conformer aux habitudes locales. En plus, c'est très seyant ! Disons que je pratique cela de la même façon que j'ai toujours évité de porter une mini-jupe devant ma grand-mère, voilà...

Et sur la plage, sauf à Goa sans doute, et pas non plus à Auroville qui est très occidentalisée, mais sur d'autres plages indiennes plus populaires, on ne se met pas en maillot du tout et les femmes se baignent avec leur sari. Le "bronzage" en maillot de bain est une coutume qui leur est encore étrangère. A nous de le comprendre aussi.

Ce n'est pas ce pendant là de la "condition féminine" en Inde qui me dérange ou me choque. Il y a bien plus grave, même si les choses évoluent peu à peu. Mais ce n'était pas le sujet de ce billet...

12. Le vendredi 2 mars 2007, 16:12 par Traou

Claude, nos comm se sont croisés : hors de question que je le supprime, qu'est ce que tu racontes ! :-) Tes dernières lignes sur le Ladakh sont terribles : j'ai envie de repartir tout de suite !!!

13. Le vendredi 2 mars 2007, 22:15 par François Granger

http://maps.google.com/maps?f=q&hl=en&sll=12.0,79.48&sspn=0.373325,0.626221&ie=UTF8&z=13&ll=11.931181,79.819107&spn=0.080953,0.165997&t=k&om=1

ou

http://minilien.com/?vFzguLsthC

14. Le samedi 3 mars 2007, 13:09 par céleste

Traou tout à fait d'accord avec ton com de 16.O1 j'ai beaucoup réfléchi et écrit sur la condition féminine indienne et je partage ton analyse

15. Le mardi 6 mars 2007, 15:23 par Quarine

Salut Traou, et merci pour tes beaux écrits, un riche voyage sans kérosène!

A Auroville il y a 14 ans, accueilli par quelques-uns de ma belle-famille indienne qui y travaillent, je suis allé à l'intérieur du Matrimandir aussi. Toutes les contradictions que tu as si bien décrit m'ont tellement rongé la paix que j'avais espéré y trouver, que je suis sorti sans fracas, mais aussi vite que possible. Me voilà devant le banyan, avec la simple réalisation que cette paix s'y trouvait en toute simplicité, sans les vanités (a)dorées de la balle de golf. Je me suis assis, le dos collé au grand tronc, entouré des branches qui plongent au sol, si elles ne sont pas des racines qui grimpent au ciel... Leur lieu universel de repos, de méditation, de rencontre, d'échange et sans religion y était depuis toujours, gratuit pour tous, humble, noble et généreux. Adopté par les Monts d'Arrée depuis plus de trente ans, j'y trouve d'autres lieux aux bras ouverts, également généreux et enracinés dans des simples sagesses. J'aime beaucoup le voyage, mon métier de musicien me porte un peu partout, mais parfois des grands voyages sont faits de quelques pas ou d'un regard qui voit devant sa propre porte...

Encore, merci pour tes mots et pensées.

16. Le mardi 6 mars 2007, 21:15 par Traou

@Quarine : Merci pour ce joli témoignage. J'ai retrouvé les sensations que j'ai ressenties moi aussi sous ce banyan, lieu de paix entre tous. Et salue affectueusement les si beaux Monts d'Arrée pour moi, s'il te plait...

17. Le mercredi 7 mars 2007, 08:31 par Jean

Je suis partiellement d'accord avec ce que tu as dit.

Je tiens quand même à apporter des précisions sur Auroville, qui ne s’adresse pas directement à ton article, mais plus aux détracteurs de cette communauté.

Tout d'abord Auroville est une ville universelle, il est donc aussi judicieux de comparer les constructions locales avec les villages avoisinants, qu'il ne l’est de les comparer avec le vieux port marseillais.

Toutefois je suis tout à fait d'accord, qu'il est au premier abord choquant de voir des blancs dans de superbes demeures à coté de villageois dans des huttes. Il est tout de même important de préciser qu'un grand nombre d'aurovilliens vivent aussi dans des cahuttes.

Il est aussi intéressant de préciser que la population d'auroville est constituée pour 45% de personnes d'origine indienne (tamoul ou non) qui sont maintenant des universaliens d'auroville. L'argument colonialiste est donc réfutable.

De plus s’il on compare le revenu des Aurovilliens avec celui des indiens à statut égal, je n'ai pas l'impression qu'il soit beaucoup plus élevé.

Les blancs Aurovilliens, parce que c’est apparemment eux qui posent problème aux visiteurs, sont en grande partie des chefs d’entreprise, enseignants ou chercheurs, qui créent des centaines d’emploi dans la région. Je ne vois pas pourquoi les Aurovilliens sous prétexte qu’ils résident en Inde et qu’ils ont la peau blanche devraient tous faire de l’humanitaire.

Comparons maintenant le niveau de vie de ces soit disant « colons », avec ceux des indiens de « middle class » et on verra qu’il est beaucoup moins élevé et surtout moins clinquant.

Pour avoir travaillé à Auroville ainsi que dans d’autres boites Indiennes, je peux assurer que les managers aurovilliens dans leur rapport avec leurs employés sont beaucoup plus respectueux des individus, qu’une grande partie des managers indiens (souvent de caste supérieure à leurs employés). Ils n’y a donc aucun mépris dans les relations qu’ils entretiennent.

Je pense qu’une semaine n’ai pas suffisante pour se faire une idée précise de cette communauté. Même si ton poste est modéré, je crois qu’il sera intéressant que tu retournes sur place afin de ne pas tomber dans la facilité des apparences.

Bonne continuation en Inde.

Jean.